Coup de fouet pour les protons

Le premier module des cavités radiofréquence supraconductrices du LHC a réussi son dernier test à pleine puissance au bâtiment SM18. Ces modules contiennent un champ électrique oscillant qui accélérera les protons le long du LHC et contribuera à maintenir la stabilité des faisceaux.


Plusieurs groupes ont collaboré pour fabriquer et tester le premier module de cavité accélératrice. Ci-dessus, des membres des groupes AB-RF, AB-ATB, AB-PO, AT-VAC, AT-ACR, TS-MME et TS-IC posent à côté du module sur lequel ils ont travaillé.

En octobre, le projet LHC a franchi une étape importante avec l'achèvement de deux mois de tests réalisés sur le premier des quatre modules des cavités radiofréquence (RF) pour l'accélérateur - deux modules pour chacun des faisceaux de protons. Chaque module comporte quatre cavités supraconductrices à cellule unique contenant un champ électrique oscillant à 400,8 MHz et a été spécialement conçu pour répondre aux exigences d'une intensité de faisceau élevée dans le LHC. Lors des essais, le champ électrique dans l'ensemble des quatre cavités du module a atteint huit millions de volts par mètre, excédant largement les 5,5 millions de volts par mètre requis pour capturer, accélérer et conserver les faisceaux du LHC.

Les cavités ont été construites par pulvérisation d'une mince couche de niobium sur du cuivre, une technologie identique à celle utilisée avec succès pour les cavités supraconductrices du LEP. Suite au transfert de technologie du CERN vers l'industrie européenne pour la production à grande échelle des modules du LEP, le CERN a pu commander à l'industrie les cavités nues du LHC et plusieurs autres éléments. Le Laboratoire assemble ensuite le module. L'expérience acquise avec le LEP s'est avérée ici indispensable, en particulier pour les processus cruciaux de nettoyage et de rinçage, ainsi que pour une autre opération capitale, l'assemblage final des modules en salle blanche.

Toutefois, étant donné que les faisceaux de protons de haute intensité du LHC seront plus difficiles à stabiliser que les faisceaux d'électrons et de positons du LEP, divers éléments des modules du LHC ont constitué de nouveaux défis techniques. L'un d'entre eux, en particulier, a été de construire des coupleurs de puissance RF qui apportent les ondes électromagnétiques dans les cavités. Le faisceau du LHC nécessite un coupleur mobile à grand débattement pour ajuster des caractéristiques de faisceaux différentes à l'injection et en régime de croisière. La nouvelle conception permet à l'antenne intérieure d'avoir une grande amplitude de déplacement sans utiliser de contacts coulissants gênants susceptibles de répandre des poussières de matière et de compromettre le vide à l'intérieur. La nouvelle conception permet également la polarisation des parties internes et externes de la ligne coaxiale qui transporte les ondes électriques jusqu'à la cavité, laquelle polarisation évite les effets d'avalanche qui pourraient entraîner la destruction du faisceau.

Une fois fabriqué, mais avant d'équiper les cavités, chaque coupleur de puissance doit subir un conditionnement pendant plusieurs semaines sur un banc d'essai spécial afin de s'assurer qu'il résiste à diverses conditions.

En outre, les cavités ont besoin d'une puissance élevée, jusqu'à 300 kilowatts, plus de trois fois celle normalement utilisée dans les cavités du LEP. Pour une conception optimale du hublot RF en céramique que doit traverser le champ électrique pour pénétrer dans les cavités, tout en conservant l'ultra-vide dans le LHC, des joints en cuivre ont été requis pour maintenir une bonne conduction thermique pendant une exploitation prolongée à haute puissance. La fabrication des joints s'est avérée difficile sur le plan technique, mais une collaboration étroite entre les spécialistes du CERN et l'industrie a permis de relever le défi.

La réussite du premier module des cavités RF du LHC est le résultat d'une collaboration fructueuse avec l'industrie et des efforts considérables déployés aussi bien par les groupes AB-RF et AB-ATB que par les spécialistes de la cryogénie, du vide, de la conversion de puissance, de la radioprotection, de la chimie, du traitement des surfaces, du génie des matériaux et d'autres disciplines dans de nombreux autres groupes des Départements AB, AT et TS.

Les quatre modules restants (trois pour l'installation du LHC et un de rechange) doivent à présent être achevés alors que se poursuit la production et le conditionnement des coupleurs de puissance. La construction et les essais des coupleurs ainsi que l'assemblage final des modules restent des opérations délicates. Toutefois, si tout se déroule comme prévu, les travaux seront terminés d'ici la fin du premier trimestre 2006, bien avant la date fixée pour l'installation dans le tunnel RUX45 du LHC.