Le LHC fait un tube à CMS

Le cœur de toute expérience LHC n’est ni un détecteur à pixels, ni un localisateur de vertex, mais un tube à faisceau. C’est le lieu de chaque collision et la frontière entre l’accélérateur et l’expérience. Le mardi 10 juin, après 15 ans d’une conception et d’une fabrication complexes, le tube à faisceau a été installé dans CMS.

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Les modules de compensation ont été les dernières pièces assemblées dans la caverne du point 5 (Cessy). «Ils agissent comme des soufflets pour nous permettre de compenser les variations de longueur lorsque nous réchauffons ou refroidissons le tube à faisceau. Ce sont les tous derniers éléments. L’installation du tube à faisceau, commencée l’année dernière, est aujourd’hui terminée», a expliqué Wolfram Zeuner, Coordinateur technique adjoint de CMS.

Installation du tube à faisceau au niveau du bouchon du détecteur CMS.

Installation de la partie centrale du tube à faisceau.

Le tube à faisceau n’est ni trop fragile, ni trop épais. Il répond parfaitement aux besoins contradictoires de la machine et du détecteur. «Pour la machine, plus c’est épais, mieux c’est, car en cas de fissure, c’est tout le LHC qui serait stoppé», explique Patrick Lepeule, l’ingénieur en charge de la conception et de l’installation du tube. «L’énergie du faisceau est telle que l’instabilité du vide est un vrai problème», poursuit-il. En outre, un tube plus solide permet également une plus grande conductivité électrique.

Le détecteur, lui, a des priorités différentes: «Pour CMS, le système idéal serait une paroi transparente que les particules pourraient traverser sans interaction. Dans l’absolu, il ne doit rien y avoir au point d’interaction, ni matière, ni support! Nous avons dû travailler en gardant toutes ces particularités à l’esprit pour finalement aboutir à un compromis», a déclaré Patrick. Les concepteurs du tube de faisceau de CMS ont également dû relever un défi supplémentaire: créer un tube permettant l’ouverture totale du détecteur.

Le compromis trouvé est un tube complexe, fait de sections à l’épaisseur variable et aux matériaux différents. Le tube est incroyablement fin sur deux mètres de chaque côté du point d’interaction et reste étanche au vide. Épais de 0,8 mm, il pèse moins de 1,5 kg et se compose de béryllium, un métal au numéro atomique peu élevé. Au-delà, on trouve des sections plus solides en acier inoxydable, s’étirant sur 18 mètres et plus larges aux extrémités. L’acier inoxydable peut être soudé et assemblé et il permet également un alignement précis.

Heureux de voir son projet prendre vie, Patrick a fait l’éloge de l’équipe d’installation: «Rien n’aurait été possible sans la disponibilité et le professionnalisme de toute l’équipe».

«On a tous connu quelques nuits blanches, a ajouté Wolfram, mais la construction d’un tube à faisceau est un art autant qu’une science, et cela en valait donc la peine. C’est une réussite commune».

Construire un tube à faisceau peut paraître simple; en fait, il s’agit d’un équipement d’une extraordinaire précision, qui prend place au cœur d’une machine tout aussi extraordinaire.

(Une version complète de cet article est disponible en anglais dans le «CMS Times» du 9 juin).