Maths et physique au cœur de l'intrigue

Venu jouer l’une de ses pièces de théâtre au CERN, l’écrivain et mathématicien Denis Guedj prépare un nouveau roman qui met en scène les recherches du LHC.

Dans les pièces de théâtre de Denis Guedj, le «un» est narcissique, le «zéro» n’est pas rien et la droite veut rectifier la courbe. Dans les romans de Denis Guedj, les êtres mathématiques ont du caractère et leur histoire est passionnante. Mathématicien et professeur d’histoire des sciences et d’épistémologie à l’Université Paris VIII, Denis Guedj s’amuse depuis des années à mettre les mathématiques en scène. Ses romans et ses pièces de théâtre rencontrent le grand public et le succès, à l’instar du «Théorème du perroquet», intrigue policière traduite en 20 langues. La raison de ce succès tient au parti pris de l’auteur, qui se refuse à faire de la pédagogie. «Si ça marche, c’est parce que mon objectif n’est pas de faire apprendre les mathématiques, explique-t-il. Je raconte des histoires et il se trouve que mes personnages sont des êtres mathématiques. Mais, c’est l’intrigue qui prime.»

Durant la Fête de la science, Denis Guedj a ainsi tenu en haleine les spectateurs venus voir sa pièce de théâtre «One zéro show» au Globe de la science et de l’innovation. Ce spectacle, créée en 1994, met en scène le chiffre 1 et le chiffre 0 qui se livrent à une lutte de pouvoir à coup d’opérations mathématiques.

Si Denis Guedj est venu la jouer au CERN, c’est aussi parce qu’il entretient un lien particulier avec le Laboratoire. Durant les années de fonctionnement du LEP, le romancier avait écrit un scénario de film se déroulant au CERN. Le projet avait été abandonné. «Mais il y a trois ans, j’ai décidé de me replonger dans les recherches du CERN et d’écrire un roman sur le LHC», explique Denis Guedj. Ce roman, intitulé «Collisions», raconte évidemment l’histoire d’une collision au CERN. Mais pas celle que l’on attend. Ce sont un homme et une femme qui se percutent et, avec eux, deux mondes se rencontrent. Mais le CERN n’est pas qu’un simple décor. Comme à son habitude, Denis Guedj profite de l’intrigue pour mettre en scène les grandes énigmes de la physique. «Paradoxalement, c’est plus compliqué avec la physique parce que les scénarios sont déjà dramatiques, souligne-t-il, Lorsque matière et antimatière se rencontrent, c’est déjà dramatique. Raconter ce drame, c’est trivial. Il faut plus de travail pour rendre l’intrigue intéressante.» Denis Guedj peaufine le roman qui sera publié en avril prochain.

En attendant, une question taraude les «communicateurs» du CERN. Le grand public perçoit souvent les mathématiques ou la physique fondamentale comme des sciences hermétiques, éloignées de la société. La justification de leur utilité dans un monde de rentabilité immédiate est souvent posée. «Il faut lutter contre l’idéologie de l’utilité immédiate, insiste Denis Guedj. L’être humain ne peut être réduit à la nécessité pure. Lorsque l’on me demande à quoi servent les mathématiques, je réponds, d’abord, à me payer, ensuite je pose la question, à quoi sert l’amour?».

par CERN Bulletin