Le CERN en Arles : le LHC au menu du prestigieux festival de photographie

Six photos de l’expérience LHC seront exposées lors de l’édition de cette année du festival de photographie Les rencontres d’Arles. La collection de Simon Norfolk, intitulée The LHC: the spirit of enquiry, a été choisie pour faire partie d'une exposition célébrant 30 ans de photographie au New York Times Magazine.

 

La collection de Simon Norfolk, intitulée The LHC: the spirit of enquiry, exposée lors du festival Les Rencontres d'Arles.

Les photos originales ont été prises en octobre 2006, lorsque Simon Norfolk  a été envoyé en mission dans un laboratoire « peu connu » de Suisse. « Quand je suis arrivé au CERN, aucune de mes connaissances n’avait jamais entendu parler de cet endroit, explique Simon, et quand j’en parlais autour de moi à mon retour, on me demandait toujours : « Où ça ? Pour y faire quoi ? ». Kathy Ryan, responsable de la photographie au New York Times Magazine, y avait envoyé Simon dans le but de « capturer quelque chose de nouveau ». Pour Simon Norfolk, la mission qui lui avait été confiée est celle dont rêve tout photographe. « Kathy ne m’a toujours donné qu’une seule consigne : "Rapporte-moi quelque chose que je n’ai jamais vu." »

Quelque chose d’inédit, c’est exactement ce que Simon a rapporté : une série de photos de « six cercles », prises sur les expériences ATLAS et CMS. Ses photos ont été prises dans l’axe de la trajectoire des faisceaux. « Il était très important pour moi de me placer exactement dans l’axe, explique Simon. Je voulais que le champ de l’appareil photo corresponde à ce que verrait un atome en entrant dans le détecteur. »

Les « cercles » en deux dimensions issus du travail final de Simon représentent bien plus que de la physique expérimentale. « Il y a toute une série d’images théologiques ou quasi-théologiques liées à l’idée de cercle de vie que l’on retrouve dans de nombreuses religions du monde » explique Simon. Des dômes de la cathédrale Saint-Paul aux peintures de sable des Indiens Navajos, en passant par la basilique Sainte-Sophie à Istanbul ou le thangka tibétain, l'image circulaire est une constante. « L’expérience est si abstraite et complexe que nous avons presque l’impression que les chercheurs se sont inspirés de quelque chose qui date du XIe siècle, explique Simon. La boucle est bouclée : il semble que nous soyons de nouveau en présence de quelque chose d’ordre théologique, comme quelque chose sorti d’un scriptorium plutôt que d’un laboratoire scientifique. Cette circularité est vraiment magnifique. »

Les photos sont exposées à Arles, en France, dans le cadre d'une exposition organisée par Kathy Ryan avant la sortie de son livre célébrant 30 années de photographie au New York Times Magazine. « L’exposition d’Arles rassemble ce qu’elle considère comme les dix meilleures collections qu’elle ait vues pendant ses 30 ans de travail au Times. C’est donc flatteur d’avoir été choisi » explique Simon. Chaque collection est exposée dans une des chapelles latérales d’une vieille église du centre d’Arles. « Chaque photographe expose dans une de ces chapelles, précise Simon. Au milieu de l’église, est placé un long pupitre sur lequel sont posées les pages du magazine où sont apparues pour la première fois les photos ainsi que des documents témoignant des échanges entre le photographe et les responsables du magazine. »

L’exposition est ouverte au public jusqu’au 18 septembre 2011.

 

Photographie argentique : quelques obstacles mais une plus grande récompense 

Simon Norfolk n’utilise pas un appareil photo ordinaire. Si son Ebony RW45 grand format peut paraître archaïque, il est en fait à la pointe de la photographie argentique. Pour Simon, une journée de travail ordinaire commence par une dizaine de minutes passées dans une salle de bains sans fenêtre ou dans toute autre pièce complètement sombre.  Simon charge son appareil d’un seul négatif, avec lequel il prendra une photo, puis le décharge, de nouveau dans le noir. Ainsi, même au cours d’une journée « hyperactive », il ne prendra pas plus de dix photos. Comme l’explique Simon, cette modération se justifie entièrement : « C’est l’opposé de la photographie numérique où l’on mitraille tout et l’on s’intéresse plus tard à ce que l’on a pris, une fois que les 600jpegs s’affichent sur l’écran d’ordinateur. En photographie argentique, on prend le temps, au contraire, de regarder autour de soi, de réfléchir à ce qu’on veut exactement exprimer, de trouver la photo idéale, puis de la prendre. » Dans le cas du CERN, six photos ont ainsi vu le jour et ont permis au laboratoire de s’afficher dans le monde entier.

 

par Jordan Juras