Les détecteurs Timepix prennent de la hauteur

Le 31 juillet, un Progress, vaisseau spatial non habité russe, a été lancé des steppes désertiques du Kazakhstan. Sa destination : la Station spatiale internationale (ISS). À bord : cinq détecteurs Timepix mis au point par la collaboration Medipix2.

 

Avec les détecteurs Timepix à bord, le vaisseau spatial Progress 48 a été lancé le 31 juillet de Baikonur Cosmodrome au Kazakhstan. Source : RSC Energia.

Les détecteurs Timepix sont de petits trajectographes à alimentation USB, s’appuyant sur la technologie Medipix2. La puce Timepix, qui a été mise au point au CERN, est associée à un capteur silicium et intégrée à un système de lecture qui a à peu près la dimension d’une clé USB. Le système de lecture miniature a été mis au point par l’Institut de physique expérimentale et appliquée de Prague. Ces systèmes ont été utilisés dans des domaines très divers, qui peuvent être aussi bien l’étude des rayons cosmiques que l'imagerie biomédicale. À présent, à bord de la Station spatiale internationale, ils assurent des mesures extrêmement précises des rayonnements spatiaux à des fins de dosimétrie.

« Aucun autre dispositif au monde n’a vraiment la capacité des détecteurs Timepix d’identifier les trajectoires de particules, explique Lawrence Pinsky, membre de la collaboration Medipix2, qui a impulsé le projet d’envoyer les détecteurs Timepix dans l’espace. Les détecteurs Timepix de la Station spatiale internationale recueilleront des données permettant de caractériser le champ de rayonnement en fonction du temps, en prenant des mesures précises du spectre de charge et de vitesse des particules présentes à l’intérieur du vaisseau. »

Parmi les nombreux types de rayonnement mesurés par les détecteurs Timepix de l'ISS, il y aura des rayonnements par ions lourds. Les ions lourds ne sont observés naturellement que dans l'espace ; sur Terre, ils n’existent que dans les accélérateurs et dans les installations de traitement du cancer. Si les effets d’une exposition aiguë – c’est-à-dire, une exposition à de fortes doses sur des périodes de temps très courtes – aux rayonnements par ions lourds sont relativement bien connus, les effets des expositions chroniques restent incertains.

Progress 48 se rapproche de l'ISS : l'amarrage a lieu moins de 24 heures après le décollage. Source : NASA TV.

« Nous savons que les ions lourds - les noyaux nus qui se trouvent dans l'espace - ont des effets beaucoup plus importants du point de vue du risque pour la santé à long terme par unité d'énergie, explique Lawrence Pinsky. Toutefois, évaluer l’étendue de ces risques est difficile. Des études in vitro ont été effectuées dans des installations de traitement par ions lourds, mais ces études sont peu fiables s'il s'agit de transposer ces résultats à l'être humain. »

En mesurant les caractéristiques essentielles des rayonnements par ions lourds, les détecteurs Timepix de l’ISS aideront les spécialistes des rayonnements à comprendre la nature du risque auquel sont exposés les astronautes, ainsi que les effets secondaires possibles à long terme de la thérapie par ions lourds. « Une partie de l’intérêt de la technologie Medipix vient du fait que les mesures de rayonnements sont complètement indépendantes de tout point-limite dosimétrique et peuvent être converties si un autre point-limite est adopté par la suite », précise Lawrence Pinsky.

Alors que le voyage dans l’espace de ces détecteurs ne fait que commencer, la NASA a déjà approuvé le transport des détecteurs Timepix sur le premier vol d’essai du module Orion, qui fera partie du prochain vaisseau habité de prochaine génération des États-Unis. Le décollage est prévu pour 2014, ce qui donnera à la collaboration Medipix3 l’occasion d’améliorer encore ses détecteurs. « Ce premier voyage vers l’ISS est l'occasion pour nous de tester l'utilisation des détecteurs dans l'espace, ce qui orientera le développement de la prochaine génération de Timepix », conclut Lawrence Pinsky.

par Katarina Anthony