Pensions du CERN : Une proposition constructive

 

Une nouvelle mise en danger de la Caisse de Pensions

 

En 2010 et 2011 le Conseil a adopté un train de mesures (voir Écho 195 pour plus d’informations) qui engagent le personnel, les pensionnés et l’Organisation à contribuer ensemble à obtenir l’équilibre de la Caisse de Pensions d’ici à 2041. En particulier, les États membres du CERN ont accepté de payer une contribution spéciale de 60 MCHF par an pendant 30 ans ou jusqu’à l’atteinte de la pleine capitalisation, lorsque celle-ci arrive plus tôt.

Aujourd’hui, moins de quatre ans plus tard, certains États membres veulent déjà trouver des moyens de revenir sur leur engagement. Le fait que l’une des parties qui ont accepté l’ensemble des mesures veut changer unilatéralement son engagement est en désaccord flagrant avec la résolution du Conseil de 2011(1)  et donc inacceptable. Néanmoins, pour être utile, nous tenons à faire une proposition constructive.

Contribution spéciale ou…

 

Actuellement, la Caisse doit sortir chaque année environ 300 MCHF pour payer les prestations de pensions dont 60 MCHF (environ 20% des pensions perçues) sont transférés à titre d’impôts par les pensionnés aux autorités fiscales de l’État dans lequel ils résident.

Nous observons que ce montant correspond plus ou moins à la contribution spéciale que les Organisations, CERN et ESO, versent au Fonds pour rétablir son équilibre.

uste retour ?

 

Ainsi, nous pourrions considérer que la contribution spéciale est une sorte de « remboursement  compensatoire » versé à la Caisse par les Organisations, pour une charge que les États membres font peser sur la Caisse même.
Le problème de la taxation était déjà présent pour les membres actifs du personnel et a été résolu par l’Organisation en introduisant une taxation interne sur les avantages financiers qu’elle verse aux membres de son personnel (Statut et Règlement du Personnel du CERN, S V 2.01). Ces derniers sont, en conséquence, exemptés de l’impôt sur le revenu sur les traitements et émoluments versés par le CERN. Une pension n’étant rien de moins qu’un salaire différé, comme le Tribunal administratif de l’OIT a confirmé (Arrêt 2793, § 20, 106e  session, 2009), l’analogie est évidente.

Par conséquent, la contribution annuelle spéciale actuelle de 61,3 MCHF est justifiée pour deux raisons :

- elle est la contribution de l’employeur pour assurer  l’équilibre de la Caisse à l’horizon 2041,
- elle compense les coûts supplémentaires encourus par la  Caisse d’avoir à prendre en compte le facteur taxation pour les pensionnés.

Le manque d’équité actuel

 

Il est donc évident que la situation actuelle est assez injuste, tant pour les États membres, que pour les pensionnés.

En effet, comme nous l’avons indiqué ci-dessus, le « remboursement  compensatoire » peut être considéré comme un moyen de neutraliser l’effet de l’imposition des pensions versées par la Caisse. Cependant, la hauteur à laquelle chaque État membre contribue à ce paiement n’a aucun rapport avec le montant de l’impôt qu’il perçoit des pensionnés qui y résident. D’un côté, on trouve les Etats tels que l’Autriche, qui n’encaisse pas d’impôt sur les pensions de certains anciens fonctionnaires internationaux qui y résident. À l’autre extrême, il y a les États hôtes du CERN et de l’ESO, où l’essentiel des pensionnés résident(2), et qui de ce fait bénéficient  de loin de la plus grande partie de la recette fiscale. Et, bien sûr, il y a la grande majorité des Etats membres où seuls quelques rares pensionnés résident.

En outre, pour les pensionnés, les conditions d’imposition dépendent du pays de résidence et donc peuvent varier beaucoup. Pour certains, comme mentionné, les pensions ne sont pas imposables du tout.

Pour une politique plus équitable

Aussi, nous proposons de :

- dispenser au maximum la Caisse de Pensions du coûteux  financement de l’impôt payé par les pensionnés aux États membres,
- créer plus d’équité à la fois entre États membres d’une part et entre pensionnés d’autre part.

Pour cela deux solutions techniques s’offrent a priori(3).

1) La première, la plus simple et la plus équitable, consisterait à étendre à tous les États membres un modèle fiscal qui est basé sur les pensions (tout comme les salaires) étant soumises à un impôt interne par l’Organisation           internationale en question. Puis, en raison du principe de non-double imposition, les pensions seraient exemptes de l’impôt national sur le revenu(4). Le montant ainsi perçu  par l’Organisation est versé à la Caisse de pensions. Pour les pensionnés, l’effet d’une telle mesure serait neutre, puisque cet impôt interne s’élèverait globalement   à ce qui est actuellement perçu au titre de l’impôt sur les pensions dans les États membres. Pour l’Organisation, l’effet immédiat serait de récupérer en grande partie ou complètement le montant payé maintenant comme une contribution spéciale à la Caisse de pensions sans compromettre  l’équilibre de la Caisse. Ce montant pourrait alors être réaffecté à d’autres fins dans le budget de l’Organisation.

2) L’autre solution serait de permettre aux États membres de préserver le principe de droit d’égalité devant l’impôt entre leurs résidents en leur permettant de continuer à percevoir un impôt sur les pensions versées par la Caisse. Dans ce cas les États membres rétrocéderaient tout ou partie des impôts prélevés localement à l’Organisation. En parallèle, les pensions de ceux qui ne paient pas d’impôt dans le pays où ils résident seraient soumises à l’imposition  interne en faveur du Fonds (voir point 1).

Conclusion

 

La proposition, que nous préférons est une imposition interne des pensions, combinée avec des accords de non-double imposition, ou son alternative de rétrocession, présentent plusieurs avantages. Elles suppriment l’effet sur la Caisse de l’imposition des pensions perçue par les États membres et, en même temps, elles éliminent l’inégalité dans l’effort que chaque État membre doit fournir aux contributions spéciales. En plus de cela les deux propositions garantissent une égalité de traitement entre tous les pensionnés pour la taxation de leur pension.

 


(1) Résolution du Conseil relative au rétablissement de la pleine capitalisation (CERN/2972, Annexe 2) :
« Le Conseil […] confirme que, étant donné que le train de mesures constitue une répartition équitable des efforts entre toutes les parties, à savoir, les membres du personnel, les pensionnés et les Organisations participantes, il n’est pas possible d’en modifier un élément sans modifier l’ensemble, étant entendu qu’il convient de maintenir dans tous les cas un modèle de répartition équitable ».
(2) À la fin de 2012, 55,8% des pensionnés résidaient en France, 32,2% en Suisse et 3,8% en Allemagne.
(3) Il convient de noter que ces propositions ne sont pas complètement nouvelles, mais ont déjà été examinées en 2010 dans le rapport final du Groupe de travail 2 (CERN/2897, voir Echo 196 pour plus d’informations). Ces solutions n’ont cependant pas été retenues et ne font pas partie du train de mesures de 2010.
(4) Par exemple, les salaires des fonctionnaires européens ne sont pas soumis à l’impôt national sur le revenu. Au lieu de cela, les salaires versés par la Commission à ses fonctionnaires sont soumis à l’impôt communautaire qui est versé directement au budget de l’U.E. Par analogie, les pensions des anciens fonctionnaires européens ne sont pas imposées dans les États membres de l’U.E., car elles sont imposées par l’U.E. Toutefois, les pensions des fonctionnaires pensionnés de l’U.E. qui résidant en Suisse, qui n’est pas membre de l’U.E., pouvaient originalement  être doublement imposées (par l’U.E. et par la  Suisse). L’accord bilatéral entre la Suisse et l’U.E. a supprimé cette double imposition et la Suisse a renoncé à la seconde imposition.

par Staff Association