Dernières nouvelles du LS1 : merci à la corne magnétique !

Les expériences auprès du Décélérateur d’antimatière (AD) reçoivent des faisceaux depuis le début de la semaine. Au cœur de la chaîne qui prépare le faisceau d’antiprotons se trouve un élément crucial : la corne magnétique, pièce délicate qui a dû être rénovée pendant le LS1 et qui montre maintenant tout ce dont elle est capable.

 

La cible et le chariot de la corne magnétique, vus d’en haut, dans le sens du faisceau.

Les antiprotons destinés à l'AD sont obtenus en projetant un faisceau de protons issu du PS sur une cible en iridium. Les particules produites par les interactions nucléaires sont toutefois diffusées à des angles très larges par rapport à la ligne de faisceau ; sans dispositif permettant de les focaliser, toutes ces précieuses particules seraient perdues. « Une corne magnétique est placée à la sortie de la cible. Elle permet de refocaliser une grande partie des particules négatives, notamment des antiprotons, pour les ramener dans une direction parallèle au faisceau et avec l’impulsion adéquate, explique Marco Calviani, physicien du département EN et spécialiste responsable de la zone de la cible de l’AD. Sa performance est cruciale pour le programme de physique de l'AD, parce que les expériences ont besoin d'une bonne production d'antiprotons pour mener à bien leurs programmes de recherche sur l'antimatière. Sans cette corne, le nombre d'antiprotons disponibles pour les expériences serait divisé par 50. »

À la fin de l’année 2013, la corne magnétique, qui avait été utilisée pendant 20 ans, a été examinée, et il est apparu qu’elle avait été gravement endommagée par des arcs électriques. Par chance, elle était encore en état de fonctionner et la structure qui l’entourait n’avait pas subi de dommages. Cependant, vu l’état des contacts électriques, le système de transmission de courant de la corne devait être remplacé pour permettre le fonctionnement fiable de l’AD après le LS1. « Il s’agit d’un système magnétique composé de trois parties principales, précise Marco Calviani. La première partie est la corne elle-même, constituée de deux conducteurs concentriques en aluminium, le conducteur interne ayant la forme d’une double parabole. Quand une impulsion de 400 kA passe à travers les conducteurs, cela crée un champ magnétique de 13 teslas entre eux. Ce champ très élevé permet de focaliser les particules qui pénètrent dans le volume intérieur de la corne. La deuxième partie est une bande d’aluminium de six mètres, qui amène le courant des générateurs à la corne. La troisième partie est un système de fixation mobile reliant les deux premières, qui assure la continuité électrique du dispositif. »

Comme la situation était critique, les experts ont décidé de remplacer les trois éléments. Ils n’ont eu que six mois pour réassembler et tester les pièces de rechange, qui ont plus de 20 ans. « Nous avons retrouvé les anciennes pièces de la bande conductrice, mais il a fallu beaucoup de travail pour les rendre utilisables, continue Marco Calviani. Dans le même temps, nous avons lancé la fabrication de pièces de rechange supplémentaires, qui ont été construites en un temps record grâce à une collaboration très fructueuse entre les départements EN, TE et BE, et l’unité HSE. »

Le système consolidé a d’abord été assemblé en surface et testé avec le courant nominal sur un banc d’essai spécialement conçu, suffisamment éloigné du milieu radioactif de la zone de la cible, puis installé en souterrain, dans la zone de la cible. Maintenant que le faisceau est de retour, après le LS1, les spécialistes peuvent mesurer les performances réelles du système. Leur verdict : aucune défectuosité.

Le saviez-vous ?

La corne magnétique a été inventée au CERN dans les années 1960 par Simon Van der Meer. Sa première application a été la physique des neutrinos. Depuis son invention, la corne magnétique a été utilisée dans de nombreuses expériences, dans le monde entier, en physique des neutrinos et pour la production d’antiprotons.

Pendant ce temps, ailleurs…

Le vendredi 12 septembre, le SPS a accéléré son premier faisceau de protons de la deuxième période d’exploitation du LHC. Avant le démarrage, une fuite avait été détectée dans l’un des principaux câbles refroidis à l’eau de l’accélérateur. Ce câble date de la période de construction de la machine ; sa conception, aujourd’hui dépassée, laisse l’eau passer à l’intérieur du câble plutôt qu’autour. Comme aucun câble de ce type n’avait été gardé en réserve, le câble en question a été sectionné et seule la partie présentant une fuite a été remplacée par un simple jeu de barres, qui n’est pas refroidi à l’eau : une manière rapide mais efficace de résoudre le problème.

Au LHC, les premiers tests de mise sous tension ont commencé le lundi 15 septembre dans le secteur 6-7, qui est à la température nominale. Pendant ce temps, le refroidissement de la machine se poursuit dans cinq secteurs.

La semaine prochaine, les responsables de la coordination du LS1 se rendront à l’atelier organisé à Chamonix pour s’entretenir de leurs derniers programmes avant le redémarrage de la machine, la semaine 11 de 2015. Des plans pour le LS2 seront également mis sur la table, rien moins que quatre ans à l’avance !

 

par Antonella Del Rosso & Katarina Anthony