L’accélérateur miniature

L’image du CERN est liée aux énormes machines accélératrices et à leur capacité à accélérer les particules à des énergies très élevées. Grâce à des études très poussées de dynamique du faisceau et de radiofréquence, et à des techniques de construction innovantes, des équipes du CERN ont réalisé le premier module d’un tout nouvel accélérateur, qui ne fera que… 2 m de long. L’accélérateur miniature pourra être, entre autres, utilisé dans les hôpitaux pour la production d’isotopes médicaux et pour le traitement des cancers. C’est l’histoire d’un petit aux grands pouvoirs.

 

Serge Mathot, responsable de la construction du « mini-RFQ », avec le premier des quatre modules qui constitueront l'accélérateur miniature.

L’accélérateur miniature est constitué d’un quadripôle à radiofréquence (RFQ), élément qui se trouve en début de chaîne de tous les accélérateurs de protons du monde, des plus petits aux plus grands. Si le LHC doit produire de très fortes intensités de faisceau à une énergie très élevée, le petit frère, lui, se contente de produire des faisceaux avec un débit limité et des particules qui, après deux mètres de parcours, ont une énergie de 5 MeV. « Lorsque nous avons relevé le défi de faire le premier accélérateur RFQ compact à haute fréquence, avec le soutien du bureau pour les applications médicales du CERN, nous savions que la technologie était à notre portée, après toutes ces années passées à développer des solutions innovantes pour le Linac4 », explique Maurizio Vretenar, chef du projet Linac4 et coordinateur du projet de petit accélérateur.

Dès le début, le petit accélérateur a été pensé pour pouvoir être modulable, compact et moins cher que ses grands frères. « Nous avons fait des études de faisabilité et de dynamique des faisceaux pendant plusieurs mois, ajoute Alessandra Lombardi, membre du département BE et responsable de la conception du RFQ. L’idée de départ était d’augmenter la fréquence de fonctionnement d’un facteur 2 par rapport aux RFQ les plus modernes, ce qui nous a permis de réduire proportionnellement les dimensions. Mais cette fréquence, jamais atteinte auparavant, posait de nouveaux défis. Au début, cela nous a semblé impossible, mais finalement, grâce à une nouvelle dynamique faisceau et à des idées innovantes pour la radiofréquence et la mécanique, nous avons pu faire un projet d’accélérateur qui s’adapte beaucoup mieux aux exigences pratiques des applications médicales. »

En effet, si les RFQ utilisés en physique sont conçus pour produire des faisceaux à haute intensité, ce « mini-RFQ » est capable de produire des faisceaux peu intenses (quelques microampères) mais stables (sans perte importante) et groupés sur une fréquence de 750 MHz. Ces caractéristiques font du « mini-RFQ » un parfait injecteur pour la nouvelle génération d’accélérateurs linéaires compacts à haute fréquence utilisés pour le traitement des cancers avec des particules (hadronthérapie). De plus, ses petites dimensions cachent une puissance remarquable : le « mini-RFQ » accélère les faisceaux à une énergie de 2,5 MeV par mètre, contre moins d’un MeV par mètre pour un RFQ classique.

La construction du premier des quatre modules - chacun faisant 50 cm de long - qui constitueront l’accélérateur final a été terminée avec succès dans les ateliers du CERN, et, dans quelques mois, les équipes pourront tester ensemble tous les modules. « Avec ce premier module, nous avons validé toutes les étapes de construction et le concept en général, explique Serge Mathot, membre du département EN et responsable de la construction du « mini-RFQ ». Au départ, plusieurs étapes dans la réalisation nous semblaient très délicates mais, grâce à l’expérience acquise dans le brasage des cavités du Linac4 et à la compétence des équipes techniques du CERN, nous avons finalement pu obtenir des résultats excellents, là encore, face à un nouveau défi technologique. »

Les applications de cet accélérateur miniature hautement technologique vont au-delà de son utilisation comme injecteur pour l’hadronthérapie. En effet, grâce à ses dimensions et à son poids réduits, le « mini-RFQ » pourra devenir l’élément central d’un système pouvant produire, directement dans les hôpitaux, les isotopes radioactifs utilisés dans l’imagerie médicale. Cela pourrait éviter les complications liées au transport de matériel radioactif et permettrait aussi d’élargir la gamme d’isotopes produits pour cet usage. Petit, mais puissant et polyvalent, le « mini-RFQ » sera aussi capable d’accélérer des particules alpha pour des techniques avancées de radiothérapie que beaucoup considèrent comme la nouvelle frontière du traitement des cancers. Et, pour finir sur une note plus légère, ses petites dimensions permettront en principe de le transporter assez facilement, ce qui sera particulièrement utile pour les analyses de matériaux et d’objets archéologiques.

L’assemblage des quatre modules est prévu pour le début de l’année prochaine.
 

Visitez l'atelier de brasage à vide !

Le Bulletin souhaite inviter les Cernois à une visite de l'atelier de brasage à vide (bâtiment 112-RA10) le 7 juillet à 14 h ou le 9 juillet à 10 hLa visite est accessible uniquement aux détenteurs d'une carte d'accès CERN. L’inscription préalable sur Indico est obligatoire.

Déroulement de la visite :

  • environ 15 minutes d’introduction par les experts,
  • environ 15 minutes de visite des lieux et des machines,
  • quelques minutes pour vos questions.


Le nombre de participants est limité à 15 par visite. Si ce nombre est dépassé, n'hésitez pas à vous inscrire malgré tout, nous pourrons ainsi vous contacter en cas de désistement ou d’organisation d’une nouvelle visite.

 

par Antonella Del Rosso