PARTNER pour l’hadronthérapie
Le réseau de formation PARTNER (Particle Training Network for European Radiotherapy) a récemment obtenu de la Commission européenne une dotation de 5,6 millions d’euros. Coordonné par le CERN, ce projet vise à former les chercheurs de demain à l’hadronthérapie et, ce faisant, à faire progresser la lutte contre le cancer.
Ce financement du projet PARTNER témoigne de l’intérêt grandissant que suscitent l’hadronthérapie et les retombées de la physique des particules en médecine. Le projet s’appuie à la fois sur la somme des travaux réalisés au cours des 10 dernières années au CERN (cf. encadré ci-dessous) et sur les connaissances médicales accumulées dans toute l’Europe. Les 25 étudiants doctorants et post-doctorants qui bénéficieront de ce budget (dont 4 seront basés au CERN) répondent à un besoin d’autant plus urgent que deux nouveaux centres de thérapie hadronique vont ouvrir prochainement, à Heidelberg, en Allemagne (le HIT), et à Pavie, en Italie (le CNAO).
« Le projet PARTNER, qui associe 10 instituts et centres de recherche à travers l’Europe, est une émanation d’ENLIGHT++, le réseau pluridisciplinaire pour l’hadronthérapie », explique Manjit Dosanjh, responsable de l’hadronthérapie au CERN et coordinatrice du réseau ENLIGHT++. « Ce réseau nous a appris que tous les pays membres étaient intéressés par la formation, afin que leur personnel soit à même d’utiliser ces nouveaux équipements. Nous nous sommes donc interrogés sur la possibilité d’obtenir un financement pour les étudiants. Nous avons déjà l’esprit d’un réseau pluridisciplinaire, et le projet, par nature, doit être international. C’est une magnifique opportunité pour les bénéficiaires ; lorsqu’ils auront achevé leur formation, dans trois ou quatre ans, il y aura des équipements nouveaux qui permettront de motiver et de former les jeunes chercheurs. »
La contribution du CERN au programme de formation PARTNER est, évidemment, étroitement liée à sa situation de leader mondial des technologies d’accélération et de grilles de calcul. En recourant à la Grille, le projet PARTNER espère pouvoir traiter les questions complexes liées à l’orientation des patients, l’optimisation de la planification des traitements et l’exploitation de l’expérience acquise en matière de traitements. Il faut, pour ce faire, échanger de gros volumes d’imagerie diagnostique, permettre le partage des bases de données sur le cancer et fusionner les systèmes d’aiguillage des patients vers les services appropriés à travers toute l’Europe.
Les 25 étudiants auront chacun leur spécialité, en fonction de l’institution à laquelle ils sont rattachés, mais ils seront formés à tous les aspects de l’hadronthérapie, couvrant aussi bien la physique des particules ou la construction de bras isocentriques (gantry) que l’épidémiologie. La sélection a commencé et les premiers étudiants devraient arriver au CERN en septembre.
Avec pour objectif ultime de mettre au point la prochaine génération de thérapies contre le cancer, le projet PARTNER concrétise non seulement une technologie et des retombées liées à l’activité du CERN, mais aussi des valeurs auxquelles l’Organisation est particulièrement attachée : la collaboration et la formation des jeunes scientifiques.
Qu’est-ce que l’hadronthérapie ?
L’hadronthérapie utilise non pas des rayons X mais des protons ou des ions carbone pour irradier les tumeurs cancéreuses. Ceux-ci peuvent cibler les tissus à traiter bien plus précisément que les rayons X et pénétrer plus loin dans le corps, avec des lésions moindres sur les tissus sains.
Les hadrons permettent de dépasser certaines contraintes associées au traitement par rayons X du fait que l’essentiel de leur énergie est déposée en fin de parcours, dans la cible, alors que les rayons X traversent le corps de part en part, à l’endroit visé, avec la déperdition d’énergie la plus importante à proximité de la pénétration dans le corps. De fait, avec les rayons X, il est très difficile d’éviter d’endommager les tissus environnants, ce qui est extrêmement problématique lorsque la tumeur est située en profondeur ou à proximité d’organes critiques, comme les yeux ou le tronc cérébral. En outre, chez des patients jeunes, qui ont encore 30 ou 40 ans à vivre, le risque de développer des tumeurs secondaires à la suite du traitement est plus élevé avec la radiothéraphie classique.
Chaque année en Europe, environ 20 000 patients par tranche de 10 millions d’habitants sont traités par radiothérapie classique. Globalement on estime qu’environ 15 % de ces patients pourraient bénéficier d’un meilleur traitement grâce à la thérapie hadronique.
Bref historique
L’hadronthérapie est une nouvelle technologie complexe qui fait appel à l’accélération, à la focalisation et à l’utilisation des protons et des ions carbone.
En 1991, Ugo Amaldi a créé la Fondation TERA pour recueillir des fonds pour financer la recherche sur des accélérateurs destinés à des applications médicales. En 1995, la fondation a lancé, en collaboration avec le CERN, l’étude PIMMS (Proton Ion Medical Machine Study) afin de définir la conception optimale d’un synchrotron à ions. Au cœur du CNAO, centre clinique d’hadronthérapie financé par l’Italie et construit à Pavie, se trouve un synchrotron de 25 mètres de diamètre, dont la conception s’inspire de cette étude.
En mai de cette année, le CERN, le CNAO, l’INFN (Institut italien de physique nucléaire) et ADAM SA, société privée genevoise, ont signé trois nouveaux accords prévoyant une poursuite de la coopération et des échanges en matière de propriété intellectuelle.