La physique à 13 TeV : ALICE - gratter la surface

Le pays des merveilles d’ALICE devient réalité chaque fois que des collisions ultrarelativistes plomb-plomb se produisent dans le LHC. À l'aide d'une énergie de collision supérieure d’un ordre de grandeur à celle du Collisionneur d’ions lourds relativistes (RHIC), ainsi qu’à des détecteurs de pointe, l’expérience étudie le plasma quarks-gluons, un état de la matière qui aurait existé durant les tout premiers instants de l’Univers.

 

Il a été observé que ce milieu extrêmement chaud se comportait pour ainsi dire comme un fluide idéal, qui, bien qu’il absorbe l’énergie de chacun des quarks et des gluons qui s’y propagent, ne les fait pratiquement pas dévier. De plus, il semble accroître la production de quarks étranges, diminuer la production de particules constituées de quarks et d’antiquarks et émettre de la lumière au cours des premières étapes de son expansion. « Les données obtenues lors de la première exploitation du LHC ont déjà remis en cause certaines des notions qui avaient été mises en évidence lors du précédent programme RHIC, souligne Federico Antinori, coordinateur pour la physique à ALICE. Grâce à l'abondance de sondes dures, c’est-à-dire des particules de haute énergie qui interagissent avec le milieu, nous avons pu obtenir des données bien plus précises sur les propriétés de cet état très particulier de la matière. L’étude des collisions proton-proton et proton-plomb nous a également réservé des surprises, avec l’observation imprévue de signaux intéressants indiquant un éventuel comportement collectif. »

Lors de la deuxième période d’exploitation du LHC, les collisions d’énergie plus élevée permettront à ALICE d'étudier ces nouveaux éléments de façon plus approfondie. « Nous nous attendons à une augmentation sensible des statistiques pour tous les types de collisions. En outre, le relèvement de l’énergie de collision se traduira par un gain supplémentaire dans les sections efficaces des sondes dures, explique Federico Ronchetti, coordinateur de l’exploitation d’ALICE. Grâce au plus grand nombre de statistiques, nous pourrons effectuer des mesures beaucoup plus détaillées. Nous nous intéresserons à la production de plusieurs types de particules en examinant leur orientation par rapport au plan de collision ; nous serons en mesure de classer les événements en fonction de la forme du milieu en expansion et nous étudierons les corrélations entre plusieurs particules. »

Gérer la luminosité d’exploitation de l’expérience est un défi pour ALICE. « Nous devrons suivre de près la zone de chevauchement des faisceaux à l'aide de nos systèmes en ligne afin que l'expérience fonctionne en toute sécurité à sa luminosité nominale et que l’on puisse donner un bon retour aux opérateurs du LHC, précise Federico Antinori. Nous utiliserons des algorithmes sophistiqués au niveau déclenchement, afin de réduire au minimum l’empilement d’événements dans les sous-détecteurs et, hors ligne, régler l’empilement résiduel. »

Le détecteur ALICE est installé au point 2 du LHC. Tout près de la zone d’interaction se trouve la ligne de transfert en provenance du SPS pour l'injection dans le LHC du faisceau de sens horaire. Une telle installation exige des équipements de vide et des systèmes de protection supplémentaires, tels que des collimateurs, qui sont une source potentielle d’interactions parasites, et par conséquent, de bruit de fond indésirable pour l’expérience. « Ces éléments ont été rénovés durant le LS1. Les conditions de bruit devraient être meilleures en mode proton-proton, conclut Federico Ronchetti. Nous pensons vraiment que, dans l'ensemble, nous avons juste gratté la surface des choses durant la première exploitation du LHC et que la deuxième période d'exploitation nous permettra d’aller beaucoup plus loin ! »


Pour en savoir plus sur la physique à 13 TeV, lisez les autres articles de la série : « LHCb – une nouvelle stratégie pour le traitement de données » et « TOTEM - une nouvelle ère de collaboration avec CMS ». Pour un point de vue « théorique » sur la prochaine période d'exploitation, lisez l'article « La vie est belle à 13 TeV ».

par Antonella Del Rosso