Le premier faisceau de neutrons frappe la cible de EAR2

Le 25 juillet 2014, environ un an après le début des travaux de construction, la zone d’expérimentation no 2 (EAR2) de n_TOF, la source de neutrons du CERN, a enregistré son premier faisceau. Inédite à bien des égards, EAR2 démarrera cet automne son très riche programme d’expérimentation.

 

La dernière partie de la ligne de faisceau à EAR2 : les neutrons arrivent de la cible de production installée sous terre et frappent les échantillons.  

Construite à une vingtaine de mètres au-dessus de la cible de production de neutrons, EAR2 est en fait un bunker connecté aux installations souterraines de n_TOF par un conduit de 80 cm de diamètre, dans lequel est installée la ligne de faisceau. Les piliers qui soutiennent le bunker s'appuient sur la structure en béton du tunnel de n_TOF, reposant partiellement sur le bâtiment des ISR. Un absorbeur de faisceau, situé sur le toit du bâtiment, vient compléter la structure.

Les physiciens utilisent des neutrons pour étudier leurs réactions en vue d'applications dans de nombreux domaines, tels que la transmutation des déchets nucléaires, les technologies nucléaires, l'astrophysique nucléaire et la physique médicale. « Le très vaste programme de recherche qui sera mené à EAR2 est d'une grande importance pour le CERN, confirme Sergio Bertolucci, directeur de la recherche et de l’informatique du CERN. En associant la nouvelle zone EAR2 à l’installation n_TOF existante, le CERN offre à présent une infrastructure unique en son genre à la communauté de physique des neutrons, laquelle pourra l’enrichir par sa contribution. »

À EAR2, les réactions induites par neutrons seront étudiées avec une très grande précision et dans de très bonnes conditions expérimentales grâce au flux instantané de neutrons extrêmement élevé fourni par l’installation. Celle-ci comprend également une pièce, isolée par une paroi en béton de la zone d'expérimentation principale, où les scientifiques prépareront les échantillons à mesurer et où sont situées les stations d'acquisition de données. « Les premières expériences seront installées cet automne et notre calendrier est déjà rempli jusqu'à la fin de 2015 », précise Enrico Chiaveri, porte-parole de la collaboration n_TOF.

Les réactions qui seront étudiées à EAR2 exigent parfois des échantillons radioactifs non encapsulés. C’est pourquoi l’ensemble de l’installation doit être conçu pour répondre à la catégorie A de radioprotection, soit la norme la plus stricte en vigueur. En particulier, l'absorbeur est fait de trois couches différentes : la première – en polyéthylène boré – pour arrêter les neutrons thermiques, la deuxième – en fer – pour arrêter les neutrons plus rapides, et la dernière – en béton – pour que le tout ne laisse passer aucun rayonnement. « La ligne de faisceau de EAR2 est également bien blindée et est équipée de collimateurs et d’un aimant à grande ouverture donnant la forme au faisceau de neutrons et permettant de réduire le bruit de fond causé par les autres particules produites lors du processus de spallation », ajoute Christina Weiss, coordinatrice de l’exploitation de n_TOF, et boursière CERN de l'Université de technologie de Vienne.

Le premier signal enregistré le 25 juillet par les différents détecteurs de l'installation EAR2.

Le 25 juillet, le moment tant attendu est arrivé lorsque les détecteurs – une combinaison de capteurs en silicium, de détecteurs MicroMegas et de détecteurs en diamant – ont mesuré le premier faisceau de neutrons dans EAR2. « C’était un faisceau de faible intensité, précise Frank Gunsing, coordinateur de n_TOF pour la physique et associé scientifique CERN du CEA Saclay, mais cela montre que la chaîne complète – de la cible de spallation au hall d’expérimentation, en passant par l’aimant de déviation et les collimateurs – fonctionne bien et que nous sommes prêts à finaliser et mettre en service cette nouvelle installation fantastique. »

par Antonella Del Rosso