La grande valse des bouchons

Quand les bouchons de la culasse de CMS mènent la danse !

Les bouchons de CMS pendant la spectaculaire opération de permutation.

Le gigantesque hall de surface de CMS n’est peut-être pas la piste de danse idéale... sauf s’il s’agit de faire valser des disques de 15 m de diamètre. La semaine dernière, trois disques bouchons de CMS, toujours en surface (YE-1, YE-2 et YE-3), ont ainsi tournoyé selon une singulière chorégraphie pour inverser leurs positions.

Mais ne vous y trompez pas : cette valse endiablée avait un but tout à fait honorable. Les bouchons d’extrémité comptent parmi les derniers éléments devant être installés dans le hall souterrain et leur permutation permettra de poursuivre le travail dans le puits pendant leur descente – un gain de temps précieux. « Du point de vue logistique, c’est très judicieux, explique Austin Ball, le coordinateur technique. Sinon, le nez du bouchon qui se trouve le plus près du centre (YE-1) rentrerait dans le tonneau, ce qui nous empêcherait d’installer le trajectographe tant que tous les trois segments ne sont pas en place. Grâce à cette manœuvre, les travaux n’auront pas besoin d’être exécutés successivement ; nous pouvons descendre les trois segments, en commençant par YE-3, sans enlever les échafaudages ou interrompre le travail. »

L’opération, qui n’était pas prévue à l’origine, n’est pas tout à fait sans risque, mais elle pourrait faire gagner trois ou quatre semaines à l’équipe sur son calendrier. Il a été décidé de permuter les disques quand Austin Ball a compris l’économie de temps qui était en jeu. « Un soir, j’étais en train de regarder les plans et, tout à coup, j’ai réalisé qu’il serait beaucoup plus logique de les placer en ordre inversé. Hubert Gerwig s’est dit que c’était une lubie de physicien, mais, toujours prêt à relever un défi, il a accepté. »

Et Hubert Gerwig d’expliquer la manœuvre : « Il a d’abord fallu faire pivoter chaque disque, puis les faire glisser parallèlement les uns par rapport aux autres et, enfin, leur faire reprendre leur orientation initiale en vue de la descente. » Pour cela, les disques ont été déposés sur des coussins d’air pressurisé scellés par une bague d’étanchéité, qui ont été glissés sur des rails métalliques graissés. Le principe est le même que celui d’un aéroglisseur : à une pression de 30 fois la pression atmosphérique, 1 cm2 peut supporter 30 kg, de sorte que chaque coussin d’un mètre de diamètre peut porter jusqu’à 250 tonnes. Tous réunis, les coussins d’air peuvent facilement soutenir les disques bouchons de 440, 880 ou 1430 tonnes.

Le coefficient de frottement du système est d’à peine 1 %. Autrement dit, il a suffi d’exercer la force nécessaire pour déplacer horizontalement un objet cent fois moins pesant. Ce système a été utilisé pour mouvoir tous les éléments lourds, aussi bien en surface que dans la caverne. On a ainsi pu assister à un spectacle étonnant : un segment entier décrivant lestement une rotation de 90° en moins d’une heure et avec autant de grâce que de précision – un mouvement digne d’un danseur étoile !

La technique, relativement audacieuse, des coussins d’air a été retenue à l’origine pour la souplesse qu’elle allait offrir aux déplacements. La récente valse des bouchons est une excellente illustration de leur maniabilité, qui a permis à CMS d’accélérer les dernières étapes de l’installation. Austin Ball ne cache pas son émerveillement : « Cela fonctionne vraiment – et mon idée a pu se concrétiser ! »