Première phase de R&D du CLIC achevée

Remontons dans le temps. Nous sommes en 2002. Le LHC est toujours en construction. L’achèvement du programme de physique du LEP est encore bien présent dans les esprits, et l’avenir des accélérateurs électron-positon au CERN reste flou. C’est à cette époque que la collaboration CLIC entreprend de démontrer la faisabilité de sa nouvelle conception d'accélérateur dans l'installation d'essai CTF3. La tâche est alors loin d’être aisée. Dix ans plus tard, le rapport préliminaire de conception (CDR) de CLIC démontre la faisabilité de nombreux éléments techniques, ce qui met un terme à la première phase de R&D du CLIC et conduira, dans le cadre de la phase suivante, à la réalisation d'études détaillées d’optimisation de la performance.

 

Images du faisceau final prises par une caméra à défilement continu. Elles montrent le processus de combinaison des faisceaux ayant lieu dans l'anneau.

Il y a dix ans, l’équipe CTF3 avait installé un atelier à l’emplacement devenu vacant des injecteurs du LIL, le linac qui fournissait des électrons et des positons au LEP. En reconstruisant et en améliorant la machine pièce par pièce, l’équipe CTF3 a transformé ce vieux linac, qui fonctionnait avec un courant de l’ordre du milliampère, en un générateur de faisceau d’entraînement d’intensité élevée. Puis, à l'aide d'éléments d'accélérateurs recyclés en provenance du monde entier, et de quelques nouvelles pièces, elle a pu ajouter une boucle de retard, un anneau de combinaison et deux lignes de faisceau d’essai complètes. « Notre installation d’essai est entièrement hybride, explique Roberto Corsini, porte-parole de la collaboration CLIC. Mais elle nous a permis de réaliser bien plus qu’une simple expérience. Nous avons surpassé nos objectifs de R&D initiaux, et démontré la faisabilité des concepts du CLIC, considérés au départ comme irréalisables. »

Parmi ces nouveaux concepts, il y avait la production d’un faisceau d’entraînement ; ce faisceau devait circuler parallèlement à l’accélérateur CLIC principal pour fournir à ce dernier une puissance RF, sans que l'on ait à ajouter de longueur supplémentaire. Pour réaliser cela, l’équipe CTF3 a dû créer un faisceau d’intensité élevée dans une partie de la longueur requise. Elle a utilisé une boucle de retard pour déphaser légèrement les faisceaux les uns par rapport aux autres, puis les a fait se superposer dans un anneau de combinaison (voir la première image). Aujourd’hui, CTF3 convertit couramment à l’aide de cette technique des faisceaux de 3,5 A en faisceaux de 30 A, suivant le principe de combinaison requis pour CLIC.

Plan de CTF3.

Ses divers axes de recherche ont également permis à CTF3 de démontrer la faisabilité de nombreux autres concepts-clés de la conception du CLIC, notamment la décélération du faisceau d’entraînement permettant l’extraction de puissance RF critique pour le projet. « À certains égards, c’est plus difficile pour l’installation expérimentale CTF3 que pour le CLIC, le jour où on le construira, explique Roberto Corsini. L'énergie d’entrée de notre faisceau d'entraînement est plus faible que l'énergie de faisceau d’entraînement la plus basse du CLIC. Et, évidemment, plus l’énergie diminue, plus la taille du faisceau augmente, et il devient de plus en plus difficile d’extraire l’énergie. Nous savions que si l’on arrivait à effectuer l'extraction pour CTF3, nous pourrions le faire pour CLIC. » Pour l’instant, CTF3 a réussi à décélérer son faisceau de 30 % sur seulement 20 mètres ; elle espère le décélérer encore de 10 % cette année.

CTF3 a également étudié la possibilité d’un transfert d’énergie du faisceau d’entraînement vers une deuxième structure accélératrice – un élément essentiel du modèle d’accélération du CLIC. Cela a été démontré dans sa station d’essai à deux faisceaux, où l’on obtient régulièrement des gradients d’accélération de 145 MV/m. Notons que CLIC devra fournir un gradient de 100 MV/m – un véritable défi, mais que CTF3 a surmonté.

Démontrer la faisabilité de ces technologies n’est qu’une première étape pour CTF3. À l’approche de la fin de la première phase de R&D, l’équipe commence à préparer la transition vers une deuxième phase de recherche, encore plus intense. Pour savoir ce qui attend l’installation d’essai CTF3, ne manquez pas la prochaine édition du Bulletin.

Le saviez-vous ?

- Visiter l’installation CTF3 est une expérience exceptionnelle non seulement pour tous les passionnés de recherche et développement, mais également pour tous les amateurs d’histoire. Vous pouvez en effet voir des éléments de la chaîne d’accélération du LEP, des anciens ISR du CERN, de l’anneau Super-ACO, en France, et de l’anneau de stockage CELSIUS, en Suède.

- CTF3 a été la première installation à créer des faisceaux isochrones - c’est-à-dire des faisceaux circulant avec la même période indépendamment de leur énergie, dans un accélérateur circulaire.

- L’équipe CTF3 a conçu et testé des structures novatrices de transfert et d’extraction de puissance (PETS) destinées à alimenter en énergie la ligne de faisceaux principale. Ces structures fonctionnent selon le mode marche/arrêt, permettant à chacune d’elles d’être mise hors tension en cas de panne électrique.

- Dans sa phase finale, à pleine énergie, l’installation CLIC aura besoin d’une puissance de plus de 500 MW. Pour cette raison, l’efficacité des transferts RF/puissance de faisceau est particulièrement importante. L’équipe CTF3 a déjà réussi à fournir une accélération du faisceau d’entraînement efficace à 95,3 %. Elle s’efforce d’atteindre des valeurs comparables dans d'autres systèmes, dans le cadre d'études visant à optimiser la consommation de puissance et d’énergie de la machine.


Visitez CTF3 !

CLEX (CLIC Experimental area).

Le service de communication interne du CERN organise une visite de l’installation d’essai du CLIC, CTF3 – une opportunité pour vous d’explorer l'équipement de R&D.

Si vous souhaitez participer, vous pouvez vous inscrire à une visite en nous envoyant un e-mail. La visite aura lieu entre le 7 et le 18 janvier 2013 (la date et l’heure définitives seront définies une fois le nombre de visiteurs établi). Notez que les visites sont ouvertes uniquement aux détenteurs d'une carte d’accès du CERN.

La visite durera 45 minutes environ et inclura :
- une introduction sur CLIC et son installation par des experts,
- une visite d'une partie de CTF3 - CLEX (CLIC Experimental area) - et de l’exposition CLIC,
- quelques minutes pour des questions.

 

par Katarina Anthony