Peter Standley 1924 – 2003
Arrivé au CERN il y a près de 50 ans, Peter Standley fut l'un des tous premiers membres du personnel du Laboratoire, dont il avait pris sa retraite il y a 20 ans.
Ses études de physique à l'université d'Oxford le conduisirent tout naturellement, durant la Seconde Guerre mondiale, à travailler sur les techniques des radars qui venaient d'être inventées ; il entra alors dans la Royal Navy en tant qu'officier radar.
Après la démobilisation, comme beaucoup de ceux qui travaillaient dans le domaine des radars, il s'intéressa à la construction d'accélérateurs de particules et prépara sa thèse sur le synchrotron à électrons de 125 MeV du Laboratoire Clarendon, à Oxford. C'est là qu'il prit part à un nouveau projet fantastique, presque inconcevable pour l'époque : la création d'un Laboratoire européen, qui allait devenir le CERN par la suite.
En 1954, il fut nommé correspondant entre le CERN et l'entreprise Metropolitan Vickers, qui avait obtenu le contrat de construction de l'accélérateur linéaire destiné au synchrotron à protons, le PS, qui fut le premier grand projet et la raison d'être de ce nouveau laboratoire.
Sa personnalité lui permit de maintenir d'excellentes « relations triangulaires » entre le groupe du CERN, l'entreprise et le Laboratoire de Harwell, où furent réalisés quelques-uns des développements techniques essentiels. L'un des aînés ayant participé à la construction du Linac garde un souvenir vivace du caractère de Peter : sa franchise constante, son honnêteté, sa fiabilité parfaite et la confiance qu'il inspirait autant de qualités appréciées de tous durant sa carrière au CERN. Il n'avait pas oublié ses origines et, naturellement, il fallu peindre le Linac en bleu « marine ».
Peter devint titulaire du CERN en 1954 et, en 1958, il fut chargé du Linac, puis de l'exploitation du PS en tant qu'adjoint de Pierre Germain, chef de la Division. Surmontant son aversion pour les tâches administratives et sa réticence à afficher une position hiérarchique, il devint chef de la Division PS en 1965. Il démissionna de ce poste en 1973 pour réintégrer le Groupe Linac, dans lequel il avait débuté sa carrière de Cernois et où il se sentait comme un poisson dans l'eau ; il fut rapidement le premier à « plonger » dans les travaux souterrains pour la machine, après une inondation mémorable au milieu des années 70.
Il quitta ses fonctions au CERN en 1983, il y a vingt ans, et passa près de dix années de cette période à lutter contre la maladie une affection grave, encore mal comprise même aujourd'hui, qui l'affaiblissait physiquement de jour en jour sans entamer sa vivacité d'esprit. Il mena ce combat avec patience et détermination, mais à mesure que ses forces diminuaient, les soins nécessaires devinrent très lourds à assumer pour son épouse Christiane, qui fit face pendant très longtemps avec un immense courage.
Peter était apprécié de tous pour ses compétences techniques et son souci du détail le plus infime. Dans les années 60, il était connu pour être l'unique membre de la Division à pouvoir démarrer et exploiter seul ce système complexe de machines. Il était économe, parcimonieux même, avec les fonds de sa division comme avec les mots, donnant ses instructions et rendant ses conclusions avec une concision parfois extrême, au grand désespoir de ses collègues non-anglophones. Peter a peut-être eu parfois du mal à faire des choix, mais lorsqu'il avait pris une décision, il s'y tenait une fois pour toutes, et il le fit tout au long de sa vie, jusqu'à ses derniers jours.