Suivre le halo du LHC à la trace

Au cœur du LHC, les faisceaux constitués de paquets de protons à intervalle de 25 ns se déplacent à une vitesse proche de celle de la lumière et traversent un grand nombre d’équipements, installés le long de l’anneau, qui surveillent leurs différents paramètres. Pendant leur voyage dans le LHC, il arrive que les particules du faisceau interagissent avec les instruments de collimation ou avec du gaz résiduel présent dans les chambres à vide. Ces interactions créent un halo, source d’un bruit de fond gênant pour les données de physique. Ce halo sera suivi de près par des sous-détecteurs de CMS, récemment installés.

 

Le système de surveillance du halo de faisceau (BHM) est installé autour du blindage mobile de CMS. Ce système a été conçu et construit par l'Université du Minnesota, le CERN, l'Université de Princeton, l'INFN de Bologne et l'Université technique nationale d'Athènes. (Image : Andrea Manna).

Le système de surveillance du halo de faisceau (BHM, Beam Halo Monitor) est constitué de 20 radiateurs Tchérenkov (des cristaux de quartz d’une longueur de 10 cm) installés à chaque extrémité de l'énorme détecteur CMS. Ce système a pour objectif de mesurer les particules susceptibles de provoquer le bruit de fond induit par la machine. « Les nouveaux sous-détecteurs vont nous permettre de mesurer ces particules et d’étudier leur impact sur certains des états finals de la physique, en particulier les plus rares et les plus difficiles à extraire du bruit de fond », explique Anne Dabrowski, physicienne à CMS et coordinatrice technique du projet Instrumentation de faisceau, rayonnement et luminosité (BRIL, Beam Radiation Instrumentation and Luminosity), qui inclut, entre autres innovations appliquées aux détecteurs, le système BHM. Comprendre les causes du bruit de fond est capital en vue d’améliorer constamment la performance des faisceaux du LHC pour CMS et d’interpréter les données de physique, car cela permet aux scientifiques de distinguer les signaux en provenance des collisions de faisceaux de ceux créés par les particules du halo du faisceau.

Les 40 unités du système BHM sont installées parallèlement au tube de faisceau, autour du blindage mobile de l’expérience. Cette disposition est idéale pour ce type de mesure, dont la sensibilité dépend en grande partie de la direction des particules incidentes. Lorsqu’une particule chargée du halo traverse un radiateur Tchérenkov, elle produit un cône de lumière aux angles proches du faisceau. Ce cône est détecté et transformé en signal électrique par le photomultiplicateur. « Ce signal renvoyé par le radiateur Tchérenkov, qui change en fonction de la direction des particules incidentes, est le principal élément qui nous permet de distinguer les particules du halo des particules produites au point de collision, explique Anne Dabrowski. Pour que la sensibilité directionnelle soit optimale, les propriétés optiques de chaque surface ont fait l’objet d’une grande attention. L’extrémité du cristal située à l’opposé du photomultiplicateur a été peinte en noir. Ainsi, les photons créés par des particules venant d’une autre direction ou les photons réfléchis par la surface du photomultiplicateur peuvent être absorbés intégralement et exclus du signal envoyé par le photomultiplicateur. » Qui plus est, l’extrême réactivité du système dans son ensemble garantit un excellent niveau de performance. Tout cela permet à la collaboration CMS d’exploiter pleinement le positionnement idéal du système BHM, dans lequel les particules du halo arriveront 12,5 ns avant les particules produites par les collisions.

Au début de sa phase de mise en œuvre, le système BHM sera employé pour donner aux spécialistes de la machine LHC des informations sur la qualité du faisceau. Après la phase de mise en service, il sera intégré au système de déclenchement de CMS et les éléments qu’il fournira seront exploités au cours de la phase de traitement des données de l’expérience. Grâce à leur excellente résistance aux rayonnements, les sous-détecteurs resteront en place, y compris dans le futur environnement du HL-LHC.  

par Antonella Del Rosso