Luisella Goldschmidt-Clermont (1925 – 2013)

Beaucoup de gens peuvent avoir un grand impact dans le cadre de leur activité, mais avec le temps, cet effet s’estompe dans la plupart des cas. Cela a toutefois été différent en ce qui concerne Luisella Goldschmidt-Clermont.

 

Photo de Luisella prise vers 1971 par sa fille Martine, alors enfant.

Elle a joué un rôle essentiel dans deux domaines qui restent encore très importants pour beaucoup d’entre nous au CERN : l’accès aisé à l’information sur la physique des particules, et l’éducation de nos enfants. Mais au-delà de ses qualités professionnelles, elle avait une personnalité riche, elle était chaleureuse, intelligente, non sans un certain humour, qui a pu l’aider pour certaines négociations.

Après une licence en Sciences sociales à l’Université Libre de Bruxelles (ULB), elle est arrivée, en 1954, dans le Service d’information scientifique du CERN. C’est elle qui a eu l’initiative d’organiser l’échange des pré-tirages d’articles entre les centres de recherche et de mettre sur pied une infrastructure d’information documentaire - adoptée ensuite des deux côtés de l’Atlantique. Dans les années 1960, elle a eu un rôle pivot dans le développement de la gestion des pré-tirages du CERN et dans celui de la bibliothèque du SLAC, aux États-Unis. Ceci est devenu plus tard le système de recherche de données en physique SPIRES de Stanford, et finalement, ce qu’on appelle aujourd’hui INSPIRE.

Une grande partie des personnes qui travaillent au CERN ne sont de passage que pour quelques années et ont vocation à retourner ensuite dans leur pays d'origine. Comment assurer l'éducation des enfants était donc une question qui se posait dans beaucoup de familles. C’est à la solution de ce problème qu’elle s’est attaquée à partir du milieu des années 1960, avec l’appui de l’Association du personnel. La création d'une école adaptée aux besoins des enfants du CERN était une gageure. Au début de l'entreprise, la Direction du CERN était assez tiède. Les délégués des États membres du CERN étaient plus que réservés vis à vis d’un projet dont ils connaissaient mieux que les Cernois la complexité administrative.

C'est Luisella, pratiquement seule, qui réussit à élaborer un modèle d'établissement public pour le Lycée international de Ferney-Voltaire, assurant ainsi la mixité sociale qui répondrait aux besoins de la population française locale, tout en intégrant des sections nationales étrangères. Cela permit aux enfants de Cernois d'autres nationalités de retourner sans trop de heurts dans leur pays d'origine.

Il faut s'être confronté aux rigidités bureaucratiques des États pour apprécier l'ampleur des obstacles que Luisella a réussi à surmonter grâce à sa capacité créative. Des milliers d'enfants ont pu et continuent d’en bénéficier, et si Luisella n'est plus parmi nous, son œuvre, elle, se poursuit...

En parallèle, elle avait soutenu une thèse de doctorat en sociologie à l’ULB sur un thème lié à ce projet. Luisella a ensuite quitté le CERN pour poursuivre une carrière dans le domaine des sciences sociales au BIT et auprès d’autres institutions - une activité qui était en harmonie avec sa nature généreuse et son idéal humaniste. Avec la disparition de Luisella, nous perdons une personne qui a toujours fait la différence. 

Ses amis et collègues du CERN


Pour consulter la thèse de doctorat soutenue par Luisella Goldschmidt-Clermont en 1971 (« Contribution à l'étude des problèmes posés par l'intégration européenne - La scolarisation des enfants de fonctionnaires du CERN »), cliquez ici.