Michele Ferro-Luzzi (1938-2015)

C’est avec la plus grande tristesse que nous avons appris le décès, le 11 mai, de Michele Ferro-Luzzi, ingénieur bien connu par les physiciens ayant travaillé au CERN pendant la période allant de la fin des années 1960 au début des années 2000.

Michele, né à Rome en 1938, a fréquenté l'école primaire et secondaire à Asmara (Érythrée), où sa famille s’était installée en 1939, puis il a étudié à l’Université de Rome, où il a obtenu son diplôme (« laurea ») en ingénierie électronique en 1962.

Après son service militaire, il a été engagé par le CERN en 1965, intégrant le groupe de physique appliquée créé par le chef de la Division de physique nucléaire (NP), Peter Preiswerk, pour appuyer les équipes de physique pour la conception et la construction de détecteurs, qui devenaient de plus en plus complexes.

Michele s’intéressait principalement à la conception des faisceaux de particules, ce qui l’a amené à devenir spécialiste de l’optique des faisceaux et de tous les aspects liés à leurs différents composants. Pendant vingt-cinq ans, il a été le membre le plus connu de son groupe, participant à presque toutes ses activités, toujours disponible chaque fois que quelqu’un avait besoin de son aide.

Beaucoup des faisceaux secondaires des halls d'expérimentation du PS ont été réalisés par lui. Parmi ceux-ci, il faut mentionner ceux du hall Sud produits à petits angles à partir d’une cible interne et ceux du hall Est provenant du faisceau de protons e3 obtenu du PS par extraction lente. La séparation du faisceau e3 en trois branches au moyen d’un aimant à septum en fer spécialement conçu pour cela a été à cette époque une importante réussite.
Michele a été pendant de nombreuses années responsable de tous les faisceaux d'essai installés par lui dans le hall Est, qui ont été utilisés intensivement pour la R&D sur les détecteurs. 

Il a également conçu le faisceau destiné à la troisième expérience g-2 sur les muons en 1974, puis, trois ans plus tard, le faisceau utilisé par l’expérience ICE (Initial Cooling Experiment), qui a démontré le refroidissement des antiprotons. C’est pour le SPS qu’il a mis au point ses derniers faisceaux, les plus élaborés : un faisceau d’anti-protons « longue distance » pour le hall Ouest en 1980, et un faisceau semblable en 1981 pour EHN2 ; ces derniers faisceaux n’ont pas pu être réalisés.

Au cours des années 1970 et 1980, Michele a supervisé les importantes contributions du groupe aux grandes expériences telles que UA1 (en 1978), le spectromètre à muons NA4 (en 1982) et, enfin, Aleph et Delphi au LEP.

Lorsque, en 1991-1992, le Directoire du CERN a voulu centraliser autour de l’Atelier central toutes les ressources mécaniques réparties jusqu'alors entre différentes divisions, Michele, proche du monde de la recherche, fut choisi pour aider le chef de ce nouveau service. Un an plus tard, il était chargé d'assurer lui-même la direction du service.

En peu de temps, de nombreux changements se sont produits dans la structure du service, et un nouveau style de travail a été adopté. Une nouvelle procédure a été définie, dix petits ateliers mécaniques locaux ont été supprimés ; il a fallu construire un nouveau bâtiment ; les contrats relatifs au personnel d'entreprise ont été revus, de même que les relations avec les prestataires de services. Michele a su assurer la meilleure transition possible entre l'ancien système et le nouveau service centralisé. Cela a permis de garantir un fonctionnement harmonieux et efficace de l’ensemble du service, qui disposait alors d'une force de travail de 160 années-personnes, si l’on inclut le personnel d’entreprise.

Michele était un collègue charmant, très apprécié par les membres de son équipe et par les utilisateurs des services dont il était responsable. En raison de sa façon d'être peu conventionnelle, mais toujours courtoise et chaleureuse, ses jeunes collaborateurs lui avaient donné le surnom de « Luzzifer », qui témoignait de son sens de l’humour et de son goût pour les paradoxes.

Nous garderons dans nos coeurs le souvenir de ce collègue et ami. Nous adressons nos condoléances à sa femme Anna-Laura et à ses quatre enfants Anna-Sofia, Giovanni, Massimiliano et Sergio.

Ses amis et collègues