La symétrie à l’honneur du Prix Nobel

Le Prix Nobel 2008 récompense trois physiciens qui ont travaillé sur les brisures de symétrie en physique des particules.

L’annonce des Prix Nobel de physique 2008 a été retransmise par webcast dans le Globe de la Science et de l’Innovation à l’occasion du vernissage de l’exposition « Accélérateur de Nobel ».

C’est la symétrie, ou plutôt la brisure de symétrie, qui est à l’honneur du Prix Nobel de physique 2008. L’Académie suédoise a récompensé le 7 octobre dernier trois physiciens des particules qui ont mené des travaux essentiels sur les mécanismes de brisure de symétrie. Le prix a été attribué pour moitié à Yoichiro Nambu, de l’institut Fermilab, pour « la découverte du mécanisme de brisure spontanée de symétrie dans la physique subatomique ». L’autre moitié est partagée par Makato Kobayashi, de l’institut japonais KEK, et Toshihide Maskawa, de l’institut Yukawa de l’Université de Kyoto, pour « la découverte de l’origine de la brisure de symétrie qui prédit l’existence d’au moins trois familles de quarks dans la nature. »

Au début des années 60, Yoichiro Nambu a introduit le concept de brisure spontanée de symétrie en physique des particules, après l’avoir étudié dans la supraconductivité. Le physicien a formulé une description mathématique de la rupture spontanée de symétrie qui constitue depuis un pilier du Modèle standard, la théorie aujourd’hui admise de la physique des particules. Ces travaux ont ouvert la voie à la théorie sur la génération de la masse, postulée indépendamment par Peter Higgs d’un côté, et Robert Brout et François Eggert de l’autre, plus connue sous le nom de mécanisme de Higgs. Yoichiro Nambu est également récompensé pour ses contributions significatives à la chromodynamique quantique, qui décrit l’interaction forte, et à la théorie des cordes.

Les travaux de Makato Kobayashi et Toshihide Maskawa récompensés par le Prix Nobel portent sur la brisure de symétrie de la charge et de la parité, connue sous le nom de violation de CP, et qui serait en partie responsable du déséquilibre entre matière et antimatière. Ils ont proposé en 1972 une matrice décrivant les interactions entre les quarks et postulé l’existence d’une troisième génération de quarks, qui ont été découverts depuis. Cette matrice formalise également la violation de CP dans l’interaction faible.

Les mécanismes de brisure de symétrie dans la génération de la masse ou dans l’interaction électrofaible sont des sujets privilégiés d’étude des expériences du LHC.

Saviez-vous?

Les symétries jouent un rôle fondamental dans la physique, en particulier à cause de leur lien étroit avec les lois de la conservation : lorsqu’un système physique subit une transformation, on dit qu’il y a symétrie lorsqu’une certaine quantité (liée à la symétrie en question) est conservée, c’est-à-dire que le système est invariant dans la transformation. Les lois de conservation sont le pilier de toute théorie physique. Certaines sont dites « universelles » et ne connaissent aucune exception. Parmi les symétries, on compte celle qui sous-tend le principe de conservation de l’énergie, conséquence directe du fait que les lois de la nature ne changent pas avec le temps. Toutefois, les physiciens ont observé que certaines symétries ne sont pas conservées ce qui entraîne d’énormes conséquences. Ainsi, si la symétrie de la charge et de la parité (CP) était conservée dans l’interaction faible, on aurait la même quantité de matière et d’antimatière dans l’Univers, et, par conséquent, matière et antimatière auraient toutes deux disparu. De même, si la symétrie n’avait pas été rompue dans le champ de Higgs primordial, au début de l’Univers, comme le supposent les théories actuelles, les particules aujourd’hui n’auraient pas de masse ! C’est pourquoi on peut vraiment considérer que « nous sommes tous les enfants de la rupture de symétrie ».

(Prix Nobel de physique 2008 – Informations pour le public – Académie royale des sciences de Suède).