Nicola Cabibbo (1935-2010)

Nicola Cabibbo, une figure de proue de la physique théorique contemporaine, est décédé d’un cancer à Rome le 16 août 2010, à l’âge de 75 ans.

 



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Avant même la découverte des quarks, il avait su formuler correctement les couplages des courants faibles pour décrire le phénomène que nous appelons aujourd’hui le « mélange des quarks ». Sa formulation, introduisant le fameux « angle de Cabibbo », fut par la suite étendue à trois familles de fermions (et plus récemment appliquée au mélange des neutrinos), et joue un rôle essentiel dans le Modèle standard des interactions fondamentales.

Au fil des ans, il a appliqué sa lucidité, son discernement et sa souplesse d’esprit à étudier une vaste gamme de problèmes. Il s’est notamment impliqué dans des expériences telles que la mesure de l’hélicité de l’électron dans la désintégration des muons (en 1963), ainsi que dans l’étude et la conception des ordinateurs parallèles APE, qu’il a développés à partir du début des années 80 pour la simulation de la théorie chromodynamique quantique des interactions fortes sur un réseau discret de l’espace-temps.

Extrêmement respecté pour ses multiples compétences, sa renommée internationale et ses talents politiques et managériaux, il a été nommé à d’importantes fonctions en Italie : il a été président de l’INFN de 1983 à 1992 et président de l’ENEA, l’agence italienne de l’énergie, de 1993 à 1998.

Depuis 1993, il était président de l’Académie pontificale des sciences. Durant pratiquement toute sa carrière scientifique, il a été professeur à Rome, où il a considérablement contribué au prestige du groupe de théorie, qui est devenu l’un des plus réputés d’Europe. D'éminents théoriciens, tels que Martinelli, Parisi, Petronzio et Testa, ont été ses étudiants. Altarelli et Maiani comptaient parmi ses jeunes collaborateurs dans les années 70.

Tout au long de sa vie, il a entretenu des liens étroits avec le CERN, et son œuvre la plus célèbre, l’article de 1963 sur le mélange, a été signé sous l’affiliation du Laboratoire. Il a par la suite été membre du SPC et du Conseil et venait au CERN régulièrement. Récemment, en 2004, il a passé une année au CERN en tant que professeur invité. Libéré de toute tâche non scientifique, il s’est replongé dans la recherche actuelle avec un enthousiasme de jeune homme, a rejoint la collaboration NA48 et, parmi d’autres contributions, a donné une explication quantitative d’un aspect inattendu des données dans la désintégration K-> 3pi dû à la ré-interaction des pions dans l’état final, calculable par la théorie de la symétrie chirale.

Nicola Cabibbo manquera cruellement à tous ceux qui ont eu la chance de travailler avec lui et de pouvoir apprécier directement ses qualités extraordinaires d’homme et de physicien.

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