Les « autres » fruits du LHC

Avec le redémarrage et les premières collisions à 3,5 TeV, 2009 et 2010 furent deux années pleines de rebondissements au LHC. Ces événements ont été suivis de très près par les médias. Cependant, un résultat important est resté bien caché : dix bébés ont vu le jour dans l’équipe qui travaille au LHC durant cette période. Les mamans, des ingénieures, des expertes en cryogénie et des assistantes administratives travaillant pour le LHC, nous confirment qu’il est possible de concilier vie professionnelle et vie privée. Deux d’entre elles nous dévoilent leurs secrets.

 

Verena Kain (gauche) et Reyes Alemany (droite) à la salle de contrôle du LHC.

Même en temps normal, être ingénieur pour l’exploitation du LHC impose un rythme de travail soutenu et des horaires décalés, car la machine fonctionne 24 heures sur 24. Les deux dernières années ont assurément été historiques pour le LHC et pour ses équipes, qui ont dû fournir une performance extraordinaire. Toutefois, malgré l’intense activité professionnelle, plusieurs femmes ont pu aussi donner une impulsion à leur vie privée et un petit « baby boom » est venu marquer cette période. Doris Chromek-Burckhart, l’ancienne présidente du Groupe consultatif sur l’égalité des chances, s’en est félicitée : « S’atteler à l’aboutissement d’un projet aussi ambitieux que le LHC donne à l’environnement professionnel quelque chose de particulièrement stimulant et c'est très gratifiant. Il est merveilleux de voir que des femmes peuvent aujourd'hui participer à une aventure aussi exigeante. Tant le CERN que la société ont énormément progressé pour établir l'égalités des chances. »

Parmi les heureuses mamans, Reyes Alemany, physicienne travaillant comme ingénieure pour l’exploitation du LHC, en est à sa troisième expérience : « Je suis vraiment très heureuse, car ma grossesse s'est très bien passée, nous confirme-t-elle. J'ai même pu travailler jusqu'au terme. Cela peut paraître surprenant, mais il m'était moins fatiguant de travailler la nuit pendant ma grossesse », a-t-elle ajouté. Après deux premières filles, qui ont maintenant 7 et 9 ans, le petit nouveau a montré le bout de son nez le 7 juin 2010. Membre du CERN depuis 16 ans, Reyes a d'abord commencé par travailler en tant que physicienne pour le détecteur DELPHI, puis pour le détecteur CMS. Elle a rejoint les équipes travaillant aux accélérateurs en 2006.

 

Quelques mois après le redémarrage du LHC, le 29 décembre 2009, Verena Kain donnait le jour à son premier enfant. Au CERN depuis neuf ans, cela fait maintenant quatre ans que Verena est ingénieure pour l’exploitation du LHC. Elle a commencé par un doctorat au sein de l’équipe du système de verrouillage du LHC, puis a continué en tant que boursière à travailler sur l'accélérateur SPS. « Pour moi, tout s’est très bien passé. J’ai accouché seulement deux semaines après être partie en congé maternité », révèle Verena. Ensuite, j’ai voulu garder un œil sur le travail car cela me permettait de ne pas avoir seulement le rôle de maman, allaiter et changer les couches ». Pour elle, le plus stressant de l'expérience de la grossesse a été la recherche d’une garde d'enfant lorsqu’elle a dû retourner au travail. « Trouver une place disponible dans une crèche est vraiment très difficile et il faut s’armer de patience. J’ai donc fini par prendre une nourrice pour garder mon petit garçon », raconte Verena.

De retour après un congé maternité, il peut se révéler difficile de trouver le bon équilibre entre son travail et son rôle de mère, car durant ces seize semaines la carrière professionnelle est plus ou moins mise entre parenthèses. « Il est vrai qu’aujourd’hui j'arrive à gérer mes deux rôles, mais sans l'aide précieuse de mon mari cela serait beaucoup plus difficile, avoue Reyes. Mais je pense que, si l'on aime son travail, ce n'est pas insurmontable ». Chapeau à toutes ces femmes qui contribuent au bon fonctionnement de deux choses qui comptent parmi les plus complexes qu’on puisse imaginer : la famille et… le LHC !

 

par Laëtitia Pedroso