Du matériel en libre accès pour une science en libre accès
Inspiré par le mouvement du logiciel libre, le Répertoire du matériel libre a été créé pour permettre aux développeurs de matériel de s’échanger les résultats de leurs travaux de R&D. La licence de matériel libre récemment publiée par le CERN offre le cadre juridique nécessaire pour assurer cet échange de connaissances et de technologies.
Il y a deux ans, un groupe de concepteurs en électronique travaillant dans des laboratoires de physique expérimentale, dirigé par Javier Serrano, un ingénieur du CERN, a créé le Répertoire du matériel libre (OHR, Open Hardware Repository). Ce projet vise à faciliter l’échange de modèles de matériel pour aller dans le sens de la « science ouverte ». L’objectif est principalement d’éviter les doubles emplois en diffusant les résultats de travaux aux équipes susceptibles d'avoir les mêmes besoins.
« Pour les développeurs de matériel, les avantages du matériel libre sont nombreux. Par exemple, c’est un très bon outil d'apprentissage pour ceux qui ne maîtrisent pas certaines technologies ; il permet aussi d’éviter de réaliser des travaux inutiles au cas où quelqu'un aurait déjà conçu ce dont on a besoin. De plus, en revoyant tous les travaux, on améliore leur qualité, explique Javier Serrano, ingénieur au département Faisceaux du CERN et fondateur d'OHR. Pour les utilisateurs (ingénieurs, scientifiques, chercheurs, etc.), le concept de matériel libre offre une grande liberté. Tout le monde a la possibilité de critiquer ou modifier le modèle, et de fabriquer le matériel spécifié dans les fichiers de conception. Au final, on bénéficie d'un meilleur matériel et d'un meilleur appui de la part des concepteurs de matériel locaux et l’on peut demander ou ajouter facilement de nouveaux éléments. »
C’est dans ce contexte que certains membres de l'équipe OHR ont éprouvé le besoin d’imposer des règles à l'utilisation des modèles publiés par le CERN. La première version de la licence OHL (Open Hardware Licence) du CERN a été créée avec l’assistance du groupe Transfert de technologies et publiée il y a deux mois sur l’OHL. Et, il y a quelques jours, une seconde version de la licence OHL a été présentée. Même si les principes relatifs aux deux versions sont les mêmes, quelques modifications ont dû être apportées suite aux commentaires de la communauté du logiciel libre. « Avec cette licence, le CERN souhaite offrir un autre moyen d'optimiser la diffusion de ses modèles de matériel et de favoriser la collaboration entre les concepteurs de matériel de recherche publics, explique Myriam Ayass, conseillère juridique au groupe Transfert de connaissances, et auteur de la licence OHL du CERN. Tout le monde peut avoir accès aux documents de conception, les étudier, les modifier et les partager. En outre, en cas de modifications apportées et diffusées, les mêmes conditions de licence s’appliquent – il s’agit de la nature « persistante » de la licence, qui garantit que toute la communauté continuera de bénéficier d'améliorations et que chacun pourra en retour apporter des modifications à ces améliorations. »
Le fait que les modèles soient « ouverts » signifie également que tout le monde peut fabriquer le produit à partir du modèle correspondant – qu’il s’agisse de particuliers, d’instituts de recherche ou de grandes entreprises – et le commercialiser. « La licence OHL du CERN indique expressément que les fabricants de produits conçus à partir de ces modèles ne doivent en aucun cas donner à entendre que leurs produits sont agréés par les concepteurs ou que ceux-ci assument une quelconque responsabilité pour ces produits », indique Myriam Ayass.
Le répertoire OHR compte déjà plus de 40 projets élaborés par des instituts, dont le CERN, GSI (Helmholtzzentrum für Schwerionenforschung) et l’Université du Cap. « Les logiciels en accès libre étaient notre source d’inspiration pour la conception du matériel libre, et on commence à observer les mêmes avantages que ceux du logiciel libre. Ceci démontre que matériel commercial et ouverture ne sont nullement incompatibles », conclut Javier Serrano.
Pour plus d’informations, lire le récent communiqué de presse sur le Répertoire du matériel libre.
par CERN Bulletin