L’hadronthérapie prend son envol en Europe

Une réunion réunissant ULICE, ENLIGHT et PARTNER s’est récemment tenue à Marbourg, en Allemagne. Les trois projets représentent aussi bien le présent que l’avenir de l’hadronthérapie en Europe où, grâce à des installations de pointe, une lutte contre le cancer par des faisceaux de protons et d’ions carbones a été lancée.

 

Représentation graphique du balayage ligne par ligne d’une tumeur (Photo HIT/GSI/Siemens).

Grâce à une communauté pluridisciplinaire très active, comprenant des physiciens, des biologistes, des radiobiologistes, des ingénieurs, des informaticiens et des médecins, l’hadronthérapie est en train de prendre son envol en Europe. Si durant quelques décennies, cette technique innovatrice était principalement employée de manière expérimentale au Japon, aux États-Unis et dans quelques laboratoires pionniers en Europe, un nombre croissant d'hôpitaux sont aujourd'hui équipés de synchrotrons et de salles de traitement dédiées à cette forme de thérapie. « L’Asie et l’Europe sont à l’avant-garde de la recherche sur l’emploi d’ions carbones pour le traitement de certaines tumeurs rares et radiorésistantes, explique Marco Durante du Helmholtzzentrum für Schwerionenforschung (GSI, Allemagne). D’un autre côté, aux États-Unis, l’utilisation de protons au lieu du traditionnel traitement radiologique par photons, est quasiment devenue la norme. »

L’avantage de cette technique s'explique par les propriétés fondamentales des protons et des ions qui en font des projectiles plus fins que les photons. Dirigés de manière très précise par des équipements de pointe, les protons ou ions peuvent déposer une grande quantité d'énergie dans une tumeur et seulement une petite quantité dans les tissus environnants, qui ont ainsi plus de chances de rester sains. « De plus en plus d’hôpitaux européens investissent dans des installations d'hadronthérapie et ont besoin de cliniciens, mais aussi de physiciens, de biologistes et d’ingénieurs. Il est donc indispensable d’échanger des données, des informations et des pratiques optimales, ainsi que des informations sur les procédures, les protocoles et les stratégies thérapeutiques. C’est pour cela que les différentes communautés se sont réunies en 2002 pour créer ENLIGHT, le Réseau européen de recherche sur la thérapie hadronique par les ions légers, qui a été financé par la Commission européenne pendant trois ans, souligne Manjit Dosanjh, responsable des projets liés aux sciences de la vie au CERN au sein du groupe Transfert de technologies et coordinatrice de ENLIGHT++ (projet qui poursuit la mission d’ENLIGHT sans bénéficier du même financement). À Marbourg, les membres de la communauté ENLIGHT ont pu faire le point sur les progrès accomplis et commencer à élaborer une planification pour l’avenir. L’ensemble de la communauté profite des échanges entre les instituts, ce qui se traduit, bien évidemment, par de meilleures thérapies pour les patients. »

Un patient suivant un traitement de radiothérapie à la clinique de Genolier.

« L’hadronthérapie se révèle très efficace contre certains types de cancers, confirme Manjit. Le Centre de thérapie par les ions de Heidelberg (HIT), en Allemagne, qui utilise des protons et des ions carbones, obtient des résultats très encourageants. La communauté a maintenant pour objectif de traiter plus de patients et d’une manière de plus en plus efficace. Ces progrès ouvriront la voie à des solutions moins onéreuses. »

Le partage de l’expérience clinique et des connaissances sur les aspects techniques complexes des traitements par hadronthérapie constitue également un pilier important du programme ULICE, le réseau européen des centres d’hadronthérapie par ions légers, financé par l’Union européenne, qui répond au besoin d'un meilleur accès aux installations, en particulier celles utilisant des ions légers. « L'un des objectifs d’ULICE est de fournir aux patients, ainsi qu'à leurs médecins traitants et aux chercheurs, un accès aux faisceaux de hadrons des installations de traitement par faisceaux de particules, explique Roberto Orecchia, directeur scientifique du CNAO, directeur de la division de radiothérapie de l’Institut européen d’oncologie (IEO) et coordinateur du projet ULICE. Lors de la réunion de Marbourg, les membres de la communauté ULICE ont pu faire un bilan des premiers résultats rendus possibles par l’accès transnational. Un récent projet permettant à des patients français de se rendre au HIT en est l'illustration. Bientôt, de nouvelles possibilités seront également offertes par notre institut, en Italie. »

« La possibilité pour les chercheurs d’observer le travail réalisé par d'autres experts du domaine est primordiale pour le développement de nouveaux instruments et protocoles, souligne Richard Poetter de l’Université médicale de Vienne, président du comité de formation et d’enseignement de la Société européenne de radiothérapie et d’oncologie (ESTRO), et coordinateur des activités de recherche commune d’ULICE. Dans le cadre du projet ULICE, des chercheurs de différents pays et disciplines travaillent à la conception de nouveaux portiques, à la planification de traitements adaptatifs innovants et à l’élaboration de protocoles communs pour le choix des patients. Nous prévoyons également de développer une base de données commune pour des tumeurs spécifiques pour lesquelles l’utilisation d’ions carbones constitue le meilleur traitement. »

La réunion de Marbourg a également été l’occasion pour des chercheurs du projet PARTNER de présenter, le temps d’une demi-journée, des exposés résumant ce que les jeunes chercheurs participant au projet ont accompli jusqu’à présent. « Grâce au projet PARTNER, 25 jeunes biologistes, ingénieurs, médecins et physiciens travaillent, avec de grands instituts européens, à l’exploration de nouvelles voies pour un traitement plus efficace du cancer par les particules », ajoute Manjit Dosanjh, coordinatrice de ce projet également. Au cours des exposés, les chercheurs ont présenté les derniers résultats de différentes recherches, parmi lesquelles la réponse du cycle cellulaire aux faisceaux de particules, l’association de ces derniers à la chimiothérapie et la possibilité de développer un traitement de hadronthérapie guidée par l’imagerie.

Aux côtés du Japon, d'autres pays d'Asie et de plusieurs centres aux États-Unis, l’Europe est à la tête des efforts de lutte contre le cancer par l’utilisation de particules. Après plusieurs années de recherche et d’essais, l’oncologie européenne récolte les fruits de ses investissements.


Pour en savoir plus :

  • une série d’articles sur le rôle du CERN dans le développement de l’hadronthérapie est disponible ici. Vous trouverez notamment plus d'informations sur le CNAO et MedAustron, les deux installations conçues sur le modèle de l’étude PIMMS, l’une des premières études sur les accélérateurs pour l’hadronthérapie réalisée au CERN.

  • la première conférence commune ICTR-PHEUniting physics, biology and medicine for better health care ») de février 2012.


ENLIGHT :

PARTNER :

par CERN Bulletin