Vincent Vuillemin : Consolider les bases techniques du CERN

Vincent Vuillemin poursuit sa mission à la tête du département du Support technique, devenu département Ingénierie. Remodelé, le département travaille au redémarrage du LHC, aux multiples projets du Laboratoire et à consolider les installations existantes.



Sur la grande table de son bureau, Vincent Vuillemin consulte le tableau des projets de son département. En rouge, s’affichent les projets ultra prioritaires, en bleu les projets en préparation et en jaune les projets futurs. C’est bien entendu le LHC qui, en rouge, tient le haut du tableau. «La remise en service du LHC est notre priorité absolue», affirme Vincent Vuillemin. Lors de tous les incidents techniques qui ont émaillé le projet LHC, des malfaçons de la ligne de distribution cryogénique aux problèmes de fabrication des collimateurs, les équipes du département de Support technique (TS), devenu Ingénierie (EN), se sont retrouvées en première ligne, faisant appel à leur expertise technique et à leur expérience du terrain pour résoudre les problèmes. Avec l’incident du secteur 3-4 du LHC, le département EN, comme les autres départements techniques, s’est à nouveau retrouvé dans le feu de l’action. «Je suis admiratif de la manière dont le personnel du CERN, et particulièrement le personnel des départements techniques, s’est investi pour répondre à l’urgence, constate Vincent Vuillemin, On aurait pu raisonnablement s’attendre à une baisse de régime, mais ce n’est pas le cas. Indépendamment de toute hiérarchie, le niveau de responsabilité individuel et l’engagement sont admirables.»

Avec les autres départements techniques, le département EN relève donc ce nouveau défi de la remise en marche du LHC à l’automne. Parallèlement, avec la restructuration, les frontières du département ont été remodelées. Son mandat n’a pour autant pas fondamentalement changé. L’entité, qui compte 380 membres du personnel, est chargée de fournir le support technique et l’expertise d’ingénierie au CERN, et plus particulièrement aux accélérateurs et aux expériences. Si la mission reste la même, certains groupes liés à l’infrastructure des sites, comme l’accès, ont rejoint le nouveau département Infrastructure et services généraux. Tandis que d’autres activités ont rejoint l’entité, comme les équipements d’arrêt de faisceau, de collimateurs et de cibles pour les expériences. EN est par ailleurs chargé de l’organisation des opérations d’arrêt des accélérateurs. Ces activités ont été regroupées pour améliorer la synergie. «Les calendriers de fonctionnement des différents accélérateurs n’étant pas les mêmes, nous pourrons par exemple mieux répartir les ressources en fonction des arrêts prévus», explique Vincent Vuillemin.

Selon Vincent Vuillemin, l’une des grandes améliorations apportées par la nouvelle structure est le regroupement des trois départements techniques au sein d’un même secteur, sous la responsabilité du directeur des accélérateurs et de la technologie, Steve Myers. «Nous nous rencontrons régulièrement avec Steve Myers et les chefs des départements Technologie et faisceaux, ce qui permet d’accroître la communication entre nos équipes, de régler les problèmes ensemble et de travailler en meilleure synergie, observe Vincent Vuillemin, C’est un avantage considérable.»

Après la remise en service du LHC, le département se prépare à une période d’exploitation d’une durée inédite, de 12 mois. «Notre mandat essentiel lors de l’exploitation est d’assurer le bon fonctionnement des périphériques de l’accélérateur, comme la fourniture en électricité ou encore la ventilation», explique Vincent Vuillemin. Or, beaucoup de ces équipements ont souffert d’un manque de rénovation durant les années de construction du LHC. «Des consolidations immédiates et des opérations de maintenance préventives sont à effectuer pour assurer l’exploitation pendant 12 mois», remarque Vincent Vuillemin. L’an passé, le département a publié une étude de risque pour évaluer les consolidations prioritaires en fonction des risques encourus.

Le département est par ailleurs appelé en renfort dans tous les autres projets qui s’affichent en rouge, bleu, jaune sur le tableau de Vincent Vuillemin: le projet de nouvel accélérateur linéaire Linac 4, les nouveaux aimants de focalisation pour la deuxième phase du LHC, tous les grands programmes d’expériences à cible fixe, les études de remplacement du PS et du collisionneur linéaire CLIC… Le département attend également la définition d’un programme de physique qui devrait émerger de l’atelier sur les nouvelles opportunités en physique qui se tiendra du 11 au 13 mai prochain. «Il faudra cependant trouver une adéquation entre ces projets et les ressources, tempère Vincent Vuillemin, La priorité pour nous va aux projets acceptés et aux expériences qui tournent.»

Ses désirs pour le futur du département passent d’abord par la modernisation des installations. «Mon grand souhait est que le CERN puisse disposer de budgets de consolidation suffisants, explique-t-il, Les installations sont vieilles et posent de nombreux problèmes de maintenance. Cette situation nous coûte cher.» Cette nécessité de rénover est, selon lui, une condition pour engager de nouveaux projets. Un autre souhait concerne les équipes d’ingénierie, encore trop éparpillées dans le Laboratoire, et qui pourraient être intégrées au sein du département EN.

Vincent Vuillemin conclut l’entretien en évoquant le facteur humain, un sujet qu’il affectionne particulièrement. «J’apprécie mon rôle de management car j’aime rencontrer les gens et discuter avec eux, confie-t-il, Je suis là pour favoriser les rapports humains afin de faciliter le travail.»

Le parcours de Vincent Vuillemin

Titulaire d’une thèse en physique appliquée à l’EPFL-Lausanne, Vincent Vuillemin est entré au CERN comme boursier en 1981. Devenu membre du personnel en 1983, il travaille six années durant sur l’expérience UA1. Il participe ensuite aux projets de recherche et développement qui préparent les grandes expériences du LHC.

En 1994, il rejoint la toute nouvelle collaboration ATLAS au sein de laquelle il exercera diverses responsabilités jusqu’en 2001. Il est alors nommé directeur adjoint de la division de Physique expérimentale avant d’intégrer le département de Support technique (TS) en 2004 comme chef du groupe de Matériau et d’ingénierie mécanique (MME). Il dirige le département TS depuis 2007, devenu département Ingénierie (EN) le 1er janvier dernier.