Faites bonne impression !

Créé dans les années 1960, le laboratoire Polymères du CERN (au sein de la section TE-MSC-MDT) relève, aujourd’hui encore, de multiples et complexes défis techniques. Grâce à une nouvelle imprimante de prototypage 3D, il produit désormais des pièces fonctionnelles directement utilisées dans nos accélérateurs.

 

Photo 1 : Cette pièce en résine transparente, produite grâce à la nouvelle imprimante de prototypage 3D, est destinée à maintenir et isoler électriquement une antenne RF en cuivre telle que celle montrée en bas à droite. Le fin « grillage » transparent qui borde la pièce est un support de construction. Celui-ci est produit en même temps que la pièce et permet de la soutenir pendant l’impression.

Au CERN, le laboratoire Polymères est sans doute l’un des plus polyvalents. Que vous ayez besoin d’une pièce isolante électriquement, de supports pour des cristaux scintillateurs, d’écarteurs de bobines ou de distributeurs de fibres optiques, la résine est probablement l’une des solutions. À base d’époxy, de silicone ou de polyuréthane, les nombreuses résines disponibles au laboratoire Polymères présentent diverses caractéristiques qui répondent à différents besoins : collage ultra fiable, moulage, isolation électrique, résistance aux températures cryogéniques ou aux radiations.

À cela s’ajoute la magie de l’impression 3D, grâce à laquelle tout ou presque devient possible. Acquise récemment, l’imprimante de prototypage 3D du laboratoire permet désormais de répondre à près de 70 % des requêtes pour ce type de technologie. Son principe repose sur la polymérisation par laser d’une résine liquide (voir encadré). Au CERN, trois résines sont actuellement disponibles pour ce type d’impression : la blanche, très flexible et de moindre coût ; la transparente, plus résistante (voir photo 1) ; et la bleue, résine composite contenant des particules de céramique particulièrement résistantes aux températures extrêmes et aux radiations, mais plus onéreuse (voir photo 2). Polymérisée couche par couche suivant un modèle numérique 3D élaboré au préalable sur un logiciel dédié, la résine prend la forme désirée avec une précision pouvant atteindre 0,01 mm (suivant le polymère utilisé et le temps de réalisation). « Le grand avantage de cette machine est qu’elle permet de mettre au point des pièces fonctionnelles aux caractéristiques mécaniques rigoureuses, indique Marco Goncalves Lopes, ingénieur en matériaux au laboratoire Polymères, rattaché à la Fondation portugaise pour la science et la technologie. Le laboratoire possède une autre imprimante 3D, qui procède par collage de fines couches de polymère en poudre. Cette dernière, utile pour étudier la forme de certains prototypes, ne permet cependant pas la production de pièces fonctionnelles. »

Photo 2 : Cet élément (en bleu), produit pour un test de bobinage, a été réalisé avec la résine la plus résistante actuellement disponible au laboratoire Polymères.

Si la vocation du laboratoire Polymères n’est pas la production à grande échelle, tous les moyens sont mis en œuvre pour répondre à chaque besoin. « Dans certains cas, nous travaillons au développement de techniques particulières avec des industriels ou d’autres laboratoires, explique Paolo Fessia, responsable de l’achat de la nouvelle imprimante de prototypage 3D. Généralement, nous élaborons les prototypes en interne, comme nous l’avons fait par exemple pour des entretoises conçues pour des tests de bobinage réalisés en parallèle au CERN et à  Fermilab (voir photo 2) dans le cadre d’un partenariat pour le projet HL-LHC. Bien sûr, nous sommes avant tout à la disposition des Cernois pour la production de pièces en urgence, ou pour le dépannage de certaines machines. » Au quotidien, plusieurs départements (notamment PH, EN et TE) et groupes du CERN travaillent avec le laboratoire Polymères pour résoudre des problématiques toujours plus pointues.
 

La photopolymérisation

Ce procédé de prototypage, développé dès les années 1980, s’appuie sur les propriétés qu’ont certaines résines à se polymériser, c’est-à-dire à se transformer en polymère solide, sous l’effet de la lumière et de la chaleur. La résine utilisée pour l’impression de prototypage 3D comporte un photoinitiateur, qui a pour rôle d’initier le processus de polymérisation sous l’effet de la lumière du laser.

 



par Anaïs Schaeffer