De grands progrès pour les supraconducteurs à haute température
L’édition de la revue Nature Materials de ce mois relate une avancée importante pour les supraconducteurs à haute température. Une nouvelle méthode a été mise au point pour traiter les fils ronds du matériau supraconducteur à haute température Bi-2212, de manière à augmenter considérablement sa densité de courant critique. Ce résultat confirme que ce conducteur est un candidat sérieux pour les futurs aimants à champ très élevé.
Jusqu’à présent, le matériau le plus utilisé dans la construction d’aimants supraconducteurs pour accélérateurs était l’alliage niobium-titane (Nb-Ti). Mais maintenant que le potentiel du Nb-Ti a été pleinement exploité, il nous faut recourir à d'autres conducteurs, qui fonctionnent avec des champs magnétiques plus élevés que ceux obtenus avec les aimants du LHC. Aujourd’hui, le composé intermétallique Nb3Sn est, après le Nb-Ti, le matériau supraconducteur le plus avancé. Des conducteurs en Nb3Sn sont maintenant prêts à être utilisés au CERN dans les aimants d’accélérateur à champ élevé – comme les aimants à 11 teslas – et dans les aimants quadripôles à grande ouverture – comme ceux qui sont développés pour la transformation du LHC en machine à haute luminosité.
« Les récents progrès spectaculaires concernant la performance des câbles de Bi-2212, réalisés au National High Magnetic Field Laboratory (NHMFL), aux États-Unis, ont fait de ce supraconducteur à haute température un candidat sérieux pour de futurs aimants capables de produire des champs magnétiques qu’aucun supraconducteur à base de niobium ne peut atteindre », explique Christian Scheuerlein, ingénieur en matériaux dans la section Supraconducteurs et dispositifs supraconducteurs au sein du groupe Aimants, supraconducteurs et cryostats du département Technologie du CERN.
Dans le cadre du programme EuCARD-2 concernant le développement des futurs aimants, le CERN collabore avec le NHMFL et les partenaires industriels Nexans (qui produit le précurseur de pointe Bi-2212) et Oxford Superconducting Technology (le fabriquant du fil de Bi-2212). Leur but est de développer des fils de Bi-2212 qui seront utilisés dans des aimants d’accélérateur capables d’atteindre 20 teslas.
L’un des inconvénients du Bi-2212 est que le matériau précurseur doit être fondu, puis solidifié à nouveau, une fois que le conducteur a sa taille et sa forme finales. Cela demande de chauffer la bobine magnétique entière à une température maximale de 900 °C environ, tout en contrôlant très précisément la répartition homogène de la température. Pour que le plein potentiel du conducteur Bi-2212 soit réalisé, le traitement thermique doit être effectué en surpression, à une pression pouvant atteindre 100 bar. « En collaboration avec des chercheurs du Laboratoire européen de rayonnement synchrotron (ESFR), nous étudions des moyens de simplifier ce procédé délicat afin de rendre encore plus intéressant l’usage du Bi-2212 pour les aimants d’accélérateur », ajoute Christian Scheuerlein, et il conclut ainsi : « Trente ans après sa découverte, le supraconducteur à haute température Bi-2212 commence à montrer un vrai potentiel pour être utilisé dans des aimants à champ très élevé ! »
Pour en savoir plus sur l’étude du Bi-2212, vous pouvez consulter l’article complet dans la revue Nature Materials (volume 13, n°14) : D.C. Larbalestier, J. Jiang, U.P. Trociewitz, F. Kametani, C. Scheuerlein, M. Dalban-Canassy, M. Matras, P. Chen, N.C. Craig, P.J. Lee, E.E. Hellstrom, “Isotropic round wire multifilament cuprate superconductor for generation of magnetic fields above 30 T”, Nature Materials, Vol. 13 (2014), 10.1038/nmat3887.
par CERN Bulletin