...et quelques mots de physiciens

Nous avons également demandé à quelques physiciens leur opinion sur le petit nombre de femmes dans la physique et sur les changements qu'induiraient une augmentation de leur représentation.

En tant que président du Groupe consultatif sur l'égalité des chances, le physicien de CMS Tiziano Camporesi estime que la sous-représentation des femmes dans les sciences tient davantage à un manque de femmes titulaires d'un doctorat qu'à des pratiques de recrutement biaisées. Il fait valoir que, au cours des cinq dernières années, le CERN a recruté en fonction de ce qu'offrait le marché. «Si vous preniez un instantané des perspectives de carrière qu'avaient les femmes dans les domaines scientifiques au milieu des années 90, vous trouveriez une situation bien moins favorable qu'aujourd'hui. Mais 20-25% de l'effectif n'est pas encore la moitié! Pour atteindre ce niveau, il faudra tout d'abord abolir les préjugés qui empêchent les jeunes femmes de s'engager dans des carrières scientifiques». Proposer aux étudiantes des modèles de professionnelles est une bonne manière de leur montrer qu'une femme scientifique peut mener une vie normale et connaître le succès. «Nous devons convaincre les femmes qu'elles ont les mêmes perspectives que les hommes lorsqu'elles s'engagent dans une profession scientifique ou technique».

Pour Dave Barney, physicien de CMS, accroître le nombre de physiciennes signifie augmenter la diversité des points de vue à la table de la collaboration, ce qui est toujours une bonne nouvelle pour une profession qui fonctionne beaucoup autour de discussions. «Si vous avez le point de vue uniquement d'hommes ou uniquement de femmes, de jeunes ou seulement de personnes plus âgées, d'Américains ou uniquement d'Allemands, vous pourrez trouver des choses, mais vous ne verrez pas tout.» Il pense que les jeunes ne sont pas attirés par la physique notamment à cause des préjugés sur les scientifiques. Lorsqu'il emmène des élèves visiter CMS, il porte un T-shirt de football et essaie de dissiper les mythes qui dépeignent les physiciens comme immanquablement barbus et vêtus de blouses blanches. «N'importe qui souhaite être physicien devrait être encouragé à le devenir, souligne Dave Barney. L'âge n'est pas une limite et le sexe ne devrait pas l'être non plus.»

Django Manglunki, d'AB/OP, enseigne la physique des accélérateurs à l'Université libre de Bruxelles depuis bientôt dix ans. Pendant toutes ces années, le pourcentage de filles dans sa classe (d'une douzaine d'étudiants) est resté constant: il oscille entre 15 et 20%, les femmes étant particulièrement mal représentées en physique des accélérateurs. Cependant, le pourcentage de femmes a sensiblement augmenté dans le groupe Opération des accélérateurs à la suite des recrutements les plus récents. Selon Django Manglunki, la présence de femmes dans la salle de contrôle crée une ambiance plus saine. «On ne peut pas tout changer du jour au lendemain, mais il n'y a aucun doute: nous allons dans la bonne direction!».