Ensemble dans la même direction

Il est parfois difficile d’expliquer en quoi consiste une collaboration mondiale dans le domaine de la physique des particules, de faire comprendre qu’une collaboration c’est aussi une compétition intense et que, quelles que soient nos différences, nous allons tous dans la même direction. Mais nous pouvons nous appuyer cette semaine sur deux brillants exemples.

 

Tout d’abord, mercredi, le Rapport de conception technique (TDR) du Collisionneur linéaire international (ILC) a été officiellement remis au Comité international sur les futurs accélérateurs (ICFA), l’organisme mondial qui supervise le développement de grands projets dans le domaine de la physique des particules.

Cet événement marque l'aboutissement de nombreuses années d'efforts dans le cadre d'une collaboration mondiale étroite entre laboratoires du monde entier. Des décisions collectives difficiles ont été prises sur des technologies concurrentes, et tous les laboratoires participants se sont ralliés à la solution retenue. Et mercredi, la communauté du collisionneur linéaire a choisi le CERN comme l’un des trois lieux où sera remis officiellement le rapport, et cela en dépit du fait que le CERN ne faisait pas partie à l’origine des principaux laboratoires chargés de développer la technologie ILC. Y a-t-il meilleur exemple pour montrer que la physique des particules est une famille mondiale ?

Évidemment, le TDR n’est qu’une étape, certes importante, sur la voie de cette éventuelle future machine. Ce qu’elle signifie, c’est que l'ILC peut être construit, si l’on dispose à la fois des arguments scientifiques et de la volonté politique nécessaires. Grâce à la remarquable performance du LHC, nous disposons maintenant d’arguments solides sur le plan de la physique. Au Japon, des signes encourageants dans les milieux scientifique et politique laissent penser que le pays serait prêt à accueillir l’ILC. Nous devons maintenant patienter. Quoi qu’il en soit, il faudra probablement attendre la prochaine décennie avant qu'un ILC puisse commencer à acquérir des données. Et quel que soit le lieu de son implantation, il est certain que cette machine sera construite dans le cadre du même type de partenariat mondial que celui qui a conduit à la remise du TDR cette semaine.

L’autre événement de la semaine a eu lieu jeudi, lors de l’inauguration de l’extension du centre de données du CERN au Centre Wigner, à Budapest. On voit ainsi que les activités d’un centre de calcul d’envergure pour la physique des particules peuvent littéralement être partagées entre deux sites différents et cela nous rappelle par ailleurs la manière dont la physique des particules procède pour analyser ses données. Le centre de données du CERN est le nœud central de la Grille de calcul mondiale pour le LHC (WLCG), où plus de 150 centres de calcul du monde entier ont rassemblé leurs ressources au profit de tous. La WLCG, avec ses serveurs de disques, ses câbles à fibres optiques et ses processeurs, matérialise le fil directeur de la physique des particules. Et le Rapport de conception technique de l’ILC nous montre noir sur blanc qu’il est possible de réaliser de grandes choses quand le monde entier collabore.

Rolf Heuer