De l'OPERA cosmique au ballet de neutrinos


Vue du détecteur OPERA avec ses deux super modules identiques, chacun contenant une section cible et un spectromètre.

Alors que l'équipe du projet CNGS (neutrinos du CERN vers le Gran Sasso) se prépare à envoyer son faisceau de neutrinos de haute intensité en Italie, à quelque 730 km, la collaboration OPERA commence la mise en service de ses détecteurs électroniques dans le laboratoire national souterrain du Gran Sasso (LNGS)

OPERA entre en scène. La collaboration va mettre en service ses détecteurs électroniques, situés à 732 km de Meyrin, dans le laboratoire national du Gran Sasso de l'INFN, afin de recevoir le faisceau de neutrinos de haute intensité du CERN, le CNGS (Neutrinos du CERN vers le Gran Sasso, voir Bulletin n° 29-30/2006). Forte de 170 physiciens de 35 instituts de recherche et d'universités du monde entier, l'expérience OPERA entend lever le voile sur le mystère des oscillations neutrino.

Le montage du détecteur OPERA a commencé en 2003 dans le Hall C du LNGS. Il comprend deux supermodules identiques, chacun contenant une partie cible et un spectromètre à grande ouverture. Après l'installation de 5900 m2 de détecteurs à lames de scintillateurs, de 3050 m2 de chambres à plaques résistives, de grands plans de trajectographie de précision qui utilisent 8064 longs tubes à dérive, ainsi que de plus de 2000 tonnes de fer pour les aimants et la structure mécanique, les deux supermodules sont maintenant terminés.

La partie principale d'OPERA, un millefeuille plomb-émulsion, permettra l'observation du neutrino du tau par la signature topologique de la désintégration de la particule tau chargée, produite lors de l'interaction du neutrino dans le plomb. L'élément de base du millefeuille d'OPERA est une brique (10 x 13 x 7,5 cm3) formée de plaques de plomb alternant avec des feuilles d'émulsion nucléaire. La machine qui produit les briques est en cours de mise en service; elle devra en assembler 200 000 par an. C'est en août que doit commencer le remplissage de la partie cible du détecteur avec des briques.

L'acquisition des données dans les détecteurs électroniques a débuté en décembre dernier, par l'enregistrement de muons du rayonnement cosmique. La mise en service finale de tous les détecteurs se poursuit sans entrave. Le premier supermodule est maintenant prêt à enregistrer les interactions des neutrinos du CNGS, et le second suivra dans quelques semaines.

Comme pour toute expérience neutrino à grande distance, la synchronisation avec le faisceau doit être très précise. Grâce à un minutieux étalonnage croisé des systèmes GPS du CERN et du LNGS, la synchronisation entre les deux laboratoires atteindra une précision de l'ordre de 100 nanosecondes. En fait, toutes les six secondes, le CNGS enverra deux paquets de neutrinos de 10,5 microsecondes chacun, décalés de 50 millisecondes. Afin de réduire le bruit de fond, le détecteur ne sélectionnera les événements qu'à l'instant où un paquet le traverse.

Restez branchés! Fin août, le premier neutrino du CERN sera détecté au Gran Sasso, et les premières interactions de neutrinos dans les briques sont attendues fin octobre. Il faudra patienter un peu pour les interactions des neutrinos du tau, mais l'expérience OPERA sera prête.


Un événement produit par un rayon cosmique dans un détecteur électronique d?OPERA.