La science au CERN et dans l’espace



Le lien entre le CERN et l’espace est bien visible cette semaine, alors que Christer Fuglesang, ancien boursier du CERN devenu astronaute à l’ESA, entame sa deuxième semaine de mission à bord du vol STS-128 de la navette spatiale. J’ai eu le plaisir de rencontrer Christer en octobre 2008 à un colloque de l’IEEE à Dresde, et il m’a demandé si je pouvais lui remettre un objet du CERN pour son vol. Plutôt qu’une casquette et un tee-shirt, nous avons décidé de lui donner un neutralino, symbolisant le lien entre physique des particules et science de l’Univers. Les neutralinos sont des particules théoriques que le LHC recherchera. S’ils existent, ils sont de bons candidats à la matière noire. Celui de Christer n’est bien sûr qu’une peluche échappée du zoo des particules, mais quel meilleur symbole du lien entre des disciplines différentes ?

Christer Fuglesang n’est pas le seul lien entre le CERN et le programme de la navette spatiale. Nous avons appris récemment que l’expérience AMS-02, qui recherchera l’antimatière et la matière noire dans l’espace, sera bien embarquée sur le dernier vol prévu pour la navette, en octobre 2010. AMS-02 est actuellement en cours de construction au CERN et est destiné à être arrimé à la Station spatiale internationale. Une fois l’expérience en orbite, le CERN lui servira de centre de données.

Tout cela est très positif pour le CERN, et montre bien quelque chose de fondamental : la science ne peut pas être compartimentée. On parle de différentes disciplines, telles que la physique, la chimie et la biologie ; voire de sous-disciplines telles que la physique des particules, l’astrophysique et la cosmologie. La science est si vaste qu’il est inévitable de la subdiviser, mais c’est souvent à l’interface de deux disciplines que sont obtenus les résultats les plus intéressants.

On peut voir le parallèle entre physique des particules et programme spatial au-delà de la science pure. Dans les deux cas, les chercheurs s’efforcent de repousser les limites de la technologie, et, inévitablement, rencontrent des obstacles. L’année 2009 marque le 40e anniversaire du premier homme sur la Lune ; le monde célèbre aujourd’hui le succès du programme Apollo, sans penser que des années de travail intense ont été nécessaires pour aboutir au triomphe de 1969. De même, nous nous émerveillons aujourd’hui des images envoyées par le télescope spatial Hubble, et nous avons oublié les résultats flous que transmettait initialement l’instrument. Christer a d’ailleurs fait l’expérience de ce que signifie travailler aux limites de la technologie la semaine dernière, quand son vol a été retardé en raison d’un défaut dans une vanne du circuit d’hydrogène liquide. Aujourd’hui, nous pouvons célébrer le succès de ce lancement et nous préparer à fêter les succès communs, sur le plan technologique et scientifique, de la physique des particules et du programme scientifique spatial dans les années à venir.

Rolf Heuer