Plutôt léger !

Higgs ou pas Higgs ? Léger ou lourd ? Pour Ignatios Antoniadis, du groupe Théorie du CERN, la réponse est : un Higgs léger. Le Higgs continue à se cacher, mais certains signes laissent penser qu’on pourrait avoir un boson de Higgs de masse faible. Si l’on reste dans le domaine des hypothèses, quelle serait l’incidence d’un Higgs de ce type sur notre compréhension de l’Univers ? Quel serait l’impact sur des théories telles que la supersymétrie et les dimensions supplémentaires ? Et enfin, comment des neutrinos supraluminiques s’insèreraient-ils dans ce puzzle ?

 

Les résultats expérimentaux de CMS obtenus par collisions proton-proton au cours desquelles on observe 4 électrons de haute énergie (en rouge). Cet événement montre les caractéristiques attendues de la désintégration d'un boson de Higgs, mais sont aussi compatibles avec les processus physiques liés au bruit de fond dans le cadre du Modèle standard.

Des signaux, peut-être des signes, mais, pour le moment, pas de boson de Higgs. À   l’heure où les expérimentateurs continuent à rassembler et à analyser des données, les théoriciens évaluent les divers modèles théoriques pour voir lequel a une probabilité d’être juste. « Les données expérimentales recueillies jusqu’à présent par les expériences tendent à confirmer ce que nous attendions en nous fondant sur le Modèle standard, explique Ignatios Antoniadis. Plusieurs paramètres qui, d’après la théorie, sont étroitement liés au boson de Higgs ont maintenant été mesurés avec une précision très élevée. Dans tous les graphiques, nous voyons que la meilleure adéquation est obtenue si l’on suppose un Higgs de masse faible. En d’autres termes, tout ce que nous savons à ce jour semble être parfaitement compatible avec l'existence d'une telle particule. »

Malgré la très bonne performance du LHC et de ses expériences, les chercheurs ne devraient sans doute pas obtenir de réponse définitive cette année ; il faudra attendre l’année prochaine. Et si nous devons attendre encore quelques mois pour trouver le Higgs, nous devrons attendre encore bien plus longtemps pour savoir si les particules supersymétriques existent ou non. « Bien que les données obtenues semblent rétrécir de plus en plus le créneau de masses dans lequel on pourrait trouver les particules supersymétriques, du point de vue technique, nous ne pouvons encore exclure leur existence, confirme Ignatios Antoniadis. Je crois que pour obtenir une réponse finale, nous devons attendre jusqu’à la prochaine phase de très haute énergie du LHC, qui devrait commencer en 2014. »

Si le Higgs existe, sa masse nous donnera également des indications sur le monde supersymétrique. « Un Higgs léger est compatible avec la supersymétrie, dont les modèles théoriques prédisent effectivement l'existence d'une particule élémentaire ayant les propriétés du fameux boson. D’un autre côté, un Higgs lourd exclurait alors la supersymétrie, du moins celle que, d’après la théorie, on peut s’attendre à découvrir au LHC », explique Antoniadis. Si on ne trouve pas de particules supersymétriques, les dimensions supplémentaires pourraient être une option très intéressante pour décrire ce qui se passe dans l’Univers. Les dimensions supplémentaires n'entraînent pas de contrainte sur la masse du Higgs. Il existe des modèles à dimensions supplémentaires qui restent cohérents en l’absence totale de boson de Higgs.

Les dimensions supplémentaires viennent de passer sur le devant de la scène, à la suite du débat qui a suivi l’annonce d'OPERA.  « Les résultats d’OPERA indiquent une violation de la limite absolue de la vitesse de la lumière. Les contraintes expérimentales découlant des mesures effectuées sur les neutrinos issus des supernovas impliquent qu'un tel effet dépendrait fortement de l'énergie des particules. Les théories prévoyant des dimensions supplémentaires peuvent en principe accepter de tels effets, mais à mon avis, nous devrions attendre une confirmation expérimentale indépendante », conclut Antoniadis.

par CERN Bulletin