Particules musicales

À chaque seconde, des centaines de particules bombardent l’atmosphère terrestre (et nous aussi). Pourtant, personne n’a jamais entendu le bruit qui en résulte. Tout comme les rayons cosmiques, les particules en interaction à l'intérieur des détecteurs au LHC sont en effet parfaitement silencieuses... à moins qu’on n’utilise la technique de « sonification », qui permettra peut-être un jour de faire entendre la musique du boson de Higgs !

Impression d'écran de la page d'accueil du site "LHC sound".

Un groupe de physiciens des particules, de compositeurs, de développeurs de logiciels et d’artistes s’est récemment impliqué dans le projet « LHC sound » afin que les particules dans le LHC produisent de la musique. De la musique ? Mais oui, grâce à la technique de sonification, qui permet de convertir des données en sons. « Avec un logiciel approprié, on peut ainsi transformer les trajectoires des particules en une musique vraiment belle », affirme Lily Asquith, membre de la collaboration ATLAS, qui a participé au projet.

Le projet « LHC sound », qui a bénéficié du soutien du STFC (Science and Technology Facilities Council), un organisme britannique, a débuté en janvier 2010. Les grands détecteurs du LHC sont capables de reconstituer les trajectoires des particules et de calculer la quantité d'énergie qu'elles laissent dans leur sillage. « Nous collectons une partie des données provenant du détecteur ATLAS dans un fichier. Ce fichier est ensuite lu par un logiciel de composition musicale, qui le transforme en musique », explique Lily.

Les échantillons sonores actuellement disponibles à l’écoute sur le site du « LHC sound » ont été créés à partir de données réelles et de données simulées. « Vous pouvez écouter la désintégration d’un boson de Higgs dans le détecteur ATLAS, ou une collision proton-proton au LHC, poursuit Lily. Nous prévoyons d'ajouter d'autres sons bientôt, par exemple une sorte de système d’alarme mélodieux qui alertera les gens s’il se produit un grand nombre d’événements inhabituels. Nous avons aussi commencé à réfléchir à la sonification des diagrammes de Feynman, ces représentations graphiques décrivant toutes les interactions possibles à l’échelle la plus petite. Nous sommes en train de développer un nouveau site web, des applications pour iPhone et des sonneries pour téléphones portables. Notre objectif à long terme est de créer des interfaces utilisateur graphiques (GUI) pour permettre de manipuler facilement les sons produits par les données sans perdre les informations sous-jacentes qu’elles contiennent. Les représentations d’événements conçues par la collaboration ATLAS en sont l’équivalent visuel, et nous espérons que ces deux approches seront complémentaires. »

Le projet « LHC sound » n’est pas le seul à utiliser la technique de sonification des données. Mickey Hart, percussionniste du groupe Grateful Dead récompensé par un Grammy Award, est l’auteur de « Rhythms of the Universe », une composition basée sur des données astrophysiques. « La NASA utilise également la sonification pour écouter le Soleil, et elle a déjà réalisé des sonifications de planètes auparavant, poursuit Lily. On peut citer également la sonification des données sismiques provenant des tremblements de terre et des volcans, qui a été développée par Domenico Vicinanza et ses collègues de Cambridge (Royaume-Uni). Faire faire de la musique aux particules est une façon d’intéresser le grand public aux résultats des expériences du LHC d’une manière novatrice, séduisante et accessible, conclut-elle. Grâce à ce projet, nous pouvons partager avec un public plus large notre enthousiasme face à cette grande aventure. »

par CERN Bulletin