L'accélération laser... maintenant riche en fibres

La technologie de l’accélération par laser présente des faiblesses sur deux points : le rendement énergétique et la cadence de répétition. En d’autres termes, les lasers consomment trop d’énergie et ne parviennent pas à accélérer les particules pendant suffisamment longtemps pour produire des collisions. ICAN, un nouveau projet financé par l’Union européenne, étudie comment les lasers à fibres peuvent aider les physiciens à surmonter ces problèmes.

 

Une diode laser pompe la lumière laser dans des lasers à fibres. (Image : Laser Zentrum Hannover).

Le réseau ICAN (International Coherent Amplification Network) étudie actuellement les possibilités qu’offrent les lasers pour la physique des collisions. Le CERN fait partie des bénéficiaires du projet et travaillera en collaboration avec 15 instituts d’autres pays, dont le KEK (Japon), Fermilab (États-Unis) et DESY (Allemagne). « Le réseau étudie la technologie déjà existante du laser à fibres qui, selon nous, représente un potentiel énorme pour les accélérateurs, explique Gérard Mourou, coordinateur d’ICAN à l’École Polytechnique, en France. Ce que nous souhaitons, c’est rendre le laser compétitif par rapport aux techniques conventionnelles d'accélération par radiofréquence. »

À l’heure actuelle, la technologie de l’accélération par laser trouve sa limite dans son fonctionnement par impulsions. Étant donné l’impossibilité d'éliminer l’excès de chaleur produit par les lasers, ceux-ci ne peuvent être utilisés pour une accélération de haute énergie. Or les lasers à fibres pourraient être la solution à ce problème. Grâce à l’utilisation de diodes laser pour le pompage de la lumière laser dans des fibres optiques classiques, la chaleur produite est absorbée, ce qui confère au laser une cadence de répétition élevée. Ainsi, le laser peut être maintenu suffisamment longtemps pour accélérer les particules et les faire entrer en collision. Les fibres devraient également améliorer le rendement énergétique global des lasers de 35 à 40 %, ce qui en ferait une technologie économiquement viable pour les expériences. « ICAN étudie la possibilité de transformer le potentiel des lasers à fibres en une technologie réalisable, précise Gérard Mourou. Après cela seulement, nous pourrons envisager des applications directes pour les accélérateurs. »

« Les spécialistes des accélérateurs du CERN aideront les instituts participants à définir les caractéristiques qui seraient utiles pour la physique des collisions, souligne Jean-Pierre Koutchouk, conseiller du Laboratoire pour les relations internationales en matière d’accélérateurs et de technologie. La participation du CERN au projet ICAN s’inscrit dans le cadre d’une stratégie plus vaste visant à encourager le développement des technologies d’accélération par laser. En soutenant ICAN et des projets de recherche similaires, le CERN contribuera à la R&D sur des technologies d’accélération potentiellement révolutionnaires. »

ICAN n’est qu’un début et, si tout se passe comme prévu, nous verrons davantage de projets d’accélérateur fondés sur la technologie des lasers à fibres. « Nous considérons ICAN comme une phase préparatoire de 18 mois qui permettra de valider la technologie laser en vue d’un éventuel projet de plus longue durée en fonction des résultats obtenus », conclut Gérard Mourou.

Le coup d’envoi du projet ICAN a été donné au CERN lors d’une réunion tenue le 22 février 2012. Le réseau a reçu la somme d’un demi-million d’euros au titre du programme Capacités du 7e PC.

par Katarina Anthony