Démarrage en trombe pour la décélération

Le 28 septembre dernier a eu lieu la réunion de lancement du projet ELENA (Extra Low ENergy Antiproton ring), organisée en collaboration avec le Comité des utilisateurs du Décélérateur d’antiprotons (ADUC). Un véritable succès, puisque plus de 90 scientifiques issus de 20 centres de recherche à travers le monde ont fait le déplacement jusqu’au CERN, témoignant ainsi un grand intérêt pour le projet. Et certains n’étaient pas venus les mains vides…

 

« On peut dire que notre réunion de lancement a été une belle réussite », se félicite Stéphan Maury, du département Faisceaux (BE) du CERN et responsable du projet ELENA. « Il y a eu plus de 90 participants, deux fois plus que ce que nous attendions ! Tous étaient très enthousiastes et impatients d’utiliser ELENA », ajoute Walter Oelert, du département PH du CERN et président de l’ADUC, un des instigateurs du projet. Représentant une vingtaine d’institutions des quatre coins du globe, tous étaient venus pour les beaux yeux d’ELENA… mais pas seulement. Certains, en effet, ont ravi l’assistance avec d’excellentes nouvelles.

« Nous avons eu une grosse surprise, raconte Stéphan Maury. Le jour de la réunion, trois nouvelles expériences nous ont été proposées dans le cadre du projet ELENA : l’une est née d’une collaboration entre l'Université de Tokyo et l'Université Aarhus, au Danemark, et consisterait à placer une cible interne dans l’anneau d’ELENA ; la seconde, portée par le GSI de Darmstadt (DE), se propose d’étudier les changements de directions du spin du proton ; pour la troisième, baptisée Gbar et présentée par le CEA de Saclay, il s’agirait de mesurer le comportement gravitationnel de l’antihydrogène au repos. Pour cette dernière, un dossier a même déjà été envoyé, et sera discuté à la réunion du SPSC du 25 octobre prochain. Quant aux deux autres, ils devraient bientôt présenter des dossiers techniques aux comités scientifiques du CERN. »

Si ces trois initiatives prennent corps, le hall du Décélérateur d’antiprotons (AD), dans lequel sera construit ELENA et qui héberge déjà les expériences ALPHA, ASACUSA, ATRAP, ACE, et bientôt AEGIS, devra être réaménagé pour les accueillir. « Actuellement, une plateforme occupe l’emplacement destiné à l’anneau d’ELENA. Nous pensions simplement la décaler pour faire place à celui-ci, mais en tenant compte de ces possibles nouvelles expériences, il nous faudra l’installer dans un autre bâtiment… ce qui implique de construire un autre bâtiment ! », explique Stéphan Maury.

Plan du hall accueillant les expériences liées à l'AD : l'anneau décélérateur d'antiprotons AD (en violet) ; les expériences ALPHA, ASACUSA et ATRAP (en vert) ; et la nouvelle bague d'ELENA (en bleu). L'expérience ACE n'est pas représentée.

Ce qui a aussi un coût. Et justement, question budget, les choses sont en train de bouger. « À ce jour, nous avons pu réunir 2,06 millions de francs suisses, les 2,35 millions de francs suisses complémentaires étant actuellement sujets à discussion dans les divers laboratoires impliqués dans la construction d’ELENA (en dehors du CERN), indique Stéphan Maury. Et maintenant que le projet est officiellement lancé, tous ces centres de recherche devraient clarifier leurs propositions en interne pour rapidement apporter leur contribution. L’Université de Brescia (IT), qui n’avait pourtant fait aucune promesse de subvention, a d’ailleurs déjà débloqué 50 000 € pour le projet. »

Parallèlement au financement, certains instituts se sont engagés sur d’autres types de contributions, tels que la fabrication d’équipements (les aimants et le système de refroidissement par électrons, notamment), et la mise à disposition d’experts hautement qualifiés. Et sur ce dernier point, les coordinateurs du projet ont eu une agréable surprise, puisqu’initialement évalués à 28, les membres externes de l’équipe d’ELENA seront finalement 32 à venir renforcer les troupes cernoises, et à se vouer corps et âme au futur décélérateur.

Prévue dans six mois, la prochaine réunion d’ELENA rassemblera à nouveau toutes les parties prenantes du projet, et permettra d’y voir plus clair sur bon nombre de points. Pour l’heure, l’équipe « ELENA » du CERN planche sur les études techniques de la machine. Elle devrait rendre son rapport technique de conception (TDR) dès l’été prochain.

Plus d’informations sur le projet ELENA dans le Bulletin du CERN n°30-31, ou dans le communiqué de presse paru le 28 septembre à l’occasion de la réunion de lancement du projet.

par Anaïs Schaeffer